Chaque jour, la rédaction de la ffgolf vous présente le coup de cœur de l’un de ses membres. Aujourd’hui, l’année passée auprès de l’équipe de France Messieurs, par Arnaud Blanc.

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C’est une scène des Mondiaux qui n’a jamais été diffusée. Le coach de l’équipe de France Messieurs, Mathieu Santerre, est assis seul dans l’herbe du Golf National, là même où se forme une tribune naturelle face au green du 18e trou. Les Italiens célèbrent leur titre de champions du monde mais lui, isolé de tout et tout le monde, ressasse probablement en une dizaine de minutes cette 6e place finale et les deux années de préparation qui viennent de s’achever. Cette équipe qu’il a monté avec Benoît Teilleria et Antoine Delon, le « groupe Monde », était une task force comme aucune autre. Et, sûrement comme aucune autre, elle m’a fait vivre une épopée fantastique.

La série Objectif Monde m’a permis de suivre les équipes de France durant huit mois. Elle m’a aussi mené à m’enticher des collectifs Dames et Messieurs pour leur ambiance familiale et leur envie de gagner. Mais force est d’admettre que « la bande à Benoît » était ma préférée. Le dire n’est pas dénigrer mon affection pour Gwladys Nocera et ses drôles de dames : leur « One Life attitude » qui consiste à vivre la vie pour ce qu’elle est - unique - m’a autant marqué que la générosité des encadrants dont les liens avaient tout de ceux d’une vraie famille. Mais il y avait un supplément avec Benoît, Mathieu, Antoine, Khélil, Olivier et leurs futurs sélectionnés Julien, Tom et Martin. Un lien qui prenait forme au South Beach International Amateur de décembre 2021.

Mathieu Santerre, quelques minutes après le dénouement des Mondiaux 2022. © ffgolf

« J'intègre les groupes WhatsApp de l'équipe »

À Miami, le tournoi était l’épreuve de confiance pour, justement, gagner celle de ceux qui, par implication sportive et par naturel patriarcal, cherchaient à protéger leurs petits du voyant rouge de ma caméra. Au terme de la semaine, je commençais à connaître les membres du groupe et rentrais satisfait de mon approche.

Puis arrive le printemps et la Nations’ Cup à Sotogrande. Mon épreuve de confirmation. Pour la première fois, j’intègre les groupes WhatsApp de l’équipe - nommé Road2World#1 - et du staff créés pour l’occasion. C’est le second, Staff Nation Cup, qui m’intrigue le plus. J’y découvre quelques vannes bien placées, des « rendez-vous dans le hall de l’hôtel » pour débriefer et surtout, le fonctionnement de leur live scoring sur le parcours : chacun d’eux suit un joueur et raconte au coup par coup la partie du concerné. Sauf qu’à trois encadrants pour quatre joueurs - Antoine Delon étant capitaine et donc au sac d’un Bleu chaque jour - les infos manquent parfois. Alors au deuxième tour, je me lance et envoie mon message : « Je me permets puisque je filme la partie de Martin, virgule au 9 pour birdie. +4 départ du 10. » L’initiative est bien reçue. Un ou deux messages de plus suivront et ponctueront une semaine globalement positive dont je tirerai mes deux premiers grands souvenirs : un surnom, « Géunlumix » (référence à la marque Lumix de mon appareil photo), et une photo avec l’équipe lors du dernier dîner.

« Le golf ne m'avait jamais autant saisi »

La consécration survient deux mois plus tard, en préparant le déplacement au Royal St George’s Golf Club pour les championnats d’Europe par équipes. Ce qui devait être un coup de fil banal avec Mathieu Santerre s’est transformé en une grande émotion à l’entente d’une phrase : « Évidemment, tu fais partie de l’équipe. » C’était galvanisant ! Depuis mes débuts avec eux, ce sentiment personnel de faire partie du groupe devenait réalité. Je savais que je n’en étais pas un membre officiel mais la considération d’un rôle, même de troisième plan, au sein de l’équipe me suffisait.

Je me rendais donc en Angleterre avec l’envie de faire mieux que d’habitude, de vous montrer leur passion, leur détermination avec l’espoir que la victoire les accompagnerait. Ça m’a transcendé toute la semaine. Je voulais qu’ils gagnent. Je voulais gagner. Au point d’en oublier mon travail - et donc de filmer - au moment le plus décisif de leur défaite en quart de finale, lorsque l’adversaire de Martin Couvra annihilait l’espoir d’une victoire par une ficelle de 18 mètres au trou n° 16. Le golf ne m’avait jamais autant saisi. Et ce n’est là qu’une infime partie de leur quotidien. Je quittai donc St George avec amertume mais à nouveau avec deux souvenirs : la découverte d’une boisson, le Pimm’s, et un polo des Bleus, remis par leur capitaine au terme d’un pari gagné entre lui et moi.

Il y aurait encore beaucoup à raconter jusqu’à ce dernier jour des championnats du monde. Les histoires folles de Benoît Teilleria, la philosophie de Mathieu Santerre, la loyauté d’Antoine Delon, l’équilibre apporté par Khélil Baba Aissa et Olivier Elissondo et ce que tous ces hommes ont instigué à leurs trois joueurs en or, tant pour leur talent que leur attitude. Je pense souvent à cette aventure. Et j’y replongerai à chaque fois que je pose les yeux sur ce polo France. Une introspection courte et intense du genre à vous faire assoir seul dans l’herbe à l’écart de tout et tout le monde. Là-même où la nostalgie se définit le mieux, entre coup de cœur et coup de blues.

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