Après quinze années de carrière au plus haut niveau sur les circuits professionnels, c'est en rookie que Sophie Giquel a participé à sa première Golfers', mi-mai à Biarritz, menant le Golf Club de Lyon à la victoire. Quand l'expérience d'une championne se mêle à l'enthousiasme d'une junior, le golf en sort grandi.

L'embrassade entre Sophie Giquel et Mathilde Claisse, épilogue émouvant d'une inoubliable Golfers' 2025. © Tomas Stevens / ffgolf

Qu'est-ce qui peut pousser une ancienne joueuse professionnelle, confrontée aux exigences d'une reconversion extra-sportive, à ressortir les clubs du placard ? Qu'est-ce qui peut inciter une femme de 42 ans, maman d'un bambin pas encore en âge d'aller à l'école et épouse d'un caddie évoluant la plupart du temps à plusieurs milliers de kilomètres, à rechausser les souliers à crampons pour aller s'entraîner sur un tapis de practice malgré la fatigue, le manque de temps et les impératifs domestiques ?

Ces dernières années, Alexandra Vilatte-Farret et Marion Ricordeau avaient fourni l'illustration du pouvoirs magiques du golf, jeu réputé pour donner beaucoup mais demander encore plus, en reprenant leur statut amateur pour défendre les couleurs de leur club respectif, le RCF La Boulie et Saint-Germain. En cette année 2025, c'est leur ancienne consœur des circuits européen et américain, Sophie Giquel-Bettan, qui les rejoint parmi les compétitrices engagées au trophée Golfers' Club. « Étant licenciée au Golf Club de Lyon, et les filles étant en Golfers', il y avait ce petit truc pour me motiver. Cette petite flamme, tout simplement ! » expliquait-elle à la veille de la première journée de compétition.

À voir aussi

Pour la Bretonne installée en région lyonnaise depuis une douzaine d'années, reprendre le golf n'a pourtant pas été facile, même si l'envie a toujours été là. « Avoir un enfant, c'est vraiment ce qui m'a remotivé à me remettre au golf. La grossesse s'est super bien passée, mais l'accouchement a été un peu compliqué, donc j'ai mis du temps à remarcher à nouveau. J'ai repris mon statut amateur en juillet dernier, et c'est vraiment à partir de là que j'ai recommencer à jouer au golf. Et en même temps, étant entrepreneure, maman d'un enfant de deux ans et épouse d'un mari [Axel Bettan, ndlr] qui est reparti caddeyer sur le LPGA Tour, si j'arrive à aller au golf une fois par semaine, c'est bien le maximum ! » rigolait-elle en cette journée ensoleillée de la mi-mai, au Golf de Biarritz le Phare.

Ayant croisé les fers avec l'élite du golf féminin sur le Ladies European Tour et le LPGA Tour, Sophie Giquel-Bettan aurait pu prétendre à un statut particulier ou à un traitement spécial au sein d'une très jeune escouade lyonnaise, mais l'expérience lui a fait voir les choses sous un angle bien différent. « Je ne veux pas que l'équipe attende trop de moi sous prétexte que je suis une ancienne joueuse du Tour... Mon enjeu cette semaine, c'est de baisser mon niveau d'attente, car ce ne serait pas réaliste d'avoir un objectif trop élevé. Par rapport à mes années sur le circuit, j'ai l'impression d'être une tout autre joueuse. Et c'est carrément frustrant ! »

Sophie Giquel-Bettan a été alignée dans le dernier simple de la finale. © Tomas Stevens / ffgolf

Sur le terrain, l'apport de l'ancienne proette est pourtant incontestable. « On a une équipe de jeunettes, que je découvre au fur et à mesure et qui sont super. J'ai l'impression de redevenir une gamine pendant une semaine ! Mais je n'ai pas forcément le rôle de la maman, car c'est ma première Golfers' : je suis à la fois la rookie de l'équipe et la plus âgée, donc c'est assez drôle ! » plaisantait-elle avant ses grands débuts dans le championnat de France par équipes Dames de première division. Au fur et à mesure que le GCL se rapproche du trophée, l'alchimie entre l'expérience de l'ancienne proette et la fraîcheur de ses jeunes coéquipières fait merveille. Après une qualification en demi-teinte (50e au total avec le 4e score de son équipe), Sophie Giquel-Bettan fait mentir son statut de rookie lors de la phase éliminatoire, au cours de laquelle elle remporte trois foursomes avec Salomé Lumbaca et deux simples. Autrement dit... tous ses matchs !

Le dernier - et le plus important - est le cinquième simple de la finale face au RCF La Boulie, qui l'oppose à Mathilde Claisse, une autre joueuse d'expérience. Alors que les deux équipes sont à égalité 3 partout, cette ultime rencontre devient subitement décisive, et les deux joueuses sont elles-mêmes all square au départ du 18.

À voir aussi

Au bout du suspense, sous les yeux incrédules des joueuses et spectateurs massés au bord du green du 18, un putt rentré de l'une suivi d'une virgule de l'autre scellent le destin de cette Golfers' 2025. Alors que de part et d'autre les Lyonnaises exultent et les Racingwomen s'effondrent, l'accolade immédiate, sincère et émouvante entre les deux dernières protagonistes restera pour moi l'apothéose d'une semaine inoubliable.

Pourquoi ? Car il est aussi difficile, si ce n'est plus, de gagner avec grâce que de perdre avec élégance ; et en serrant ainsi dans ses bras son adversaire en pleurs, Sophie Giquel-Bettan a montré que le qualificatif de championne ne dépend pas du statut, du circuit, de la compétition ou de l'âge, mais de bien de cette petite flamme qui continue à brûler en elle : l'amour du golf.