En proie à de très sérieux ennuis de santé en 2021, le Tarbais vient de se qualifier pour la finale des Cartes du Korn Ferry Tour programmée du 4 au 7 novembre à Savannah (Géorgie). Un sésame décroché avec panache grâce à deux derniers tours d’anthologie alors que tout espoir semblait être… perdu. Récit.

Abdiquer, un verbe qui ne fait pas partie du dictionnaire de Cyril Bouniol © AURÉLIEN MEUNIER / GETTY IMAGES EUROPE - AFP

On reproche souvent aux pros français leur manque de mental au moment de l’emballage final, quand la victoire se joue le plus souvent sur un putt décisif… Cyril Bouniol, lui, a fait preuve d’un sacré tempérament ce samedi 22 octobre en Floride sur le Plantation Preserve Golf Course & Club, hôte d’une session du Stage II des Cartes du Korn Ferry Tour

Soixante-sixième après deux tours, à quatorze coups du leader et à onze d’une place qualificative pour la finale prévue à Savannah (Géorgie) du 4 au 7 novembre, le Tarbais a pourtant réussi l’impensable. Sur les trente-six derniers trous, il a ainsi joué -15 en cumulé, postant d’abord un sublime 64 (-7) le vendredi avant d’enchaîner le lendemain avec un énorme 63 (-8), sans la moindre erreur. À l’arrivée, il prend la 14e place à -13 total, gagne 34 rangs au leaderboard et valide du même coup son ticket pour sa 4e finale des Cartes de la deuxième division U.S. Remarquable ! 

Je voulais me prouver que ce n’était pas la fin de ma carrière. Alors que tout le laissait penser

« Après deux tours, j’étais un peu dégoûté car j’avais plutôt bien joué mais ça n’avait pas payé, se remémore le Français, installé depuis plusieurs années à Willow Park (Texas). Cela ne pouvait pas continuer à s’enchaîner comme ça… J’avais envie de me prouver que je pouvais réaliser un miracle. J’avais fait trop d’efforts pour revenir, en travaillant dur tous les jours. Je me suis retrouvé au fond du gouffre pendant plusieurs mois, en ayant à peine la force de sortir du lit… Je me suis remis en question au point de repartir à la salle de sport alors que je déteste ça. C’est ce qui m’a très certainement donné cette force sur ces deux derniers tours d’aller chercher quelque chose de spécial. Je voulais me prouver que ce n’était pas la fin de ma carrière. Alors que tout le laissait penser. Mon état d’esprit, c’était : ça passe ou ça casse. »

Cyril Bouniol est un miraculé. Après une seconde dose de vaccin contre le Covid-19 administrée dans le courant du premier semestre 2021, sa santé se détériore subitement. Des mains qui tremblent au putting sans la moindre explication, des sauts d’humeurs, des insomnies de plus en plus fréquentes, des pulsations cardiaques à 170-175 au repos, une perte de connaissance allant même jusqu’au coma durant quelques jours… On lui diagnostique une maladie du système immunodéficient qui va avoir des répercussions sur sa thyroïde. Ce calvaire va durer plusieurs mois avant que son état s’améliore sensiblement à partir du mois de mars dernier.

J’ai repris le sport, sans violence, pour permettre à mon cœur de retrouver un rythme, on va dire, normal. Là, ça revient petit à petit dans la norme même si ça reste encore un peu élevé

« Ma rémission n’a pas encore été confirmée complètement, tempère-t-il. Je suis passé à une prise de sang tous les trois mois. Avec tout le stress en ce moment, je sens que je dors moins bien la nuit. Cela joue aussi sur les hormones, et notamment sur ma thyroïde. Il faudra que je prenne une décision en fin d’année pour voir si je ne me fais pas opérer (ablation de la thyroïde). On va se laisser du temps, si le traitement se stabilise… Mais on réfléchit… » 

« Une chose est sûre, je sens une nette amélioration, poursuit-il. J’apprends à mieux écouter mon corps. C’est assez fluctuant. Quand je ne me sens pas à 100 %, j’en tiens compte. J’ai repris le sport, sans violence, pour permettre à mon cœur de retrouver un rythme, on va dire, normal. Là, ça revient petit à petit dans la norme même si ça reste encore un peu élevé. Cet été, on était encore à plus de 100 au repos. Le sport me permet d’être bien physiquement et d’appréhender comme il faut le parcours, tenir les 18 trous, les 72 trous… Au Stage II, j’ai senti des petits coups de moins bien, notamment sur les neuf derniers le samedi, où tu as la pression. Je n’avais pas vraiment de marge d’erreur. Cela requiert de l’énergie quand il faut jouer -7 ou -8… »

Finir au moins dans le top 40...

On l’a dit, Cyril Bouniol va disputer sa quatrième finale des Cartes sur le Korn Ferry Tour. Les enjeux sont ici multiples. Le vainqueur après 72 trous (sur deux parcours différents du Landings Club de Savannah) jouira d’un droit de jeu complet pour la saison 2023. Les golfeurs classés de la 2e à la 10e place ex æquo sont assurés de disputer les douze premiers tournois au calendrier. Ceux qui terminent entre la 11e et la 40e place joueront les huit premiers tournois de la saison alors qu’un re-ranking interviendra tous les quatre tournois.  

« Moi, je vise le plus haut possible, prévient l’ancien étudiant d’Abilene Christian UniversityDès que je m’inscris dans un tournoi, c’est pour le gagner. Mais l’objectif est au minimum de décrocher le top 40 final (Ndlr, ce qu’il n’avait pas réussi à atteindre lors de ses trois précédentes finales). Après, ça va dépendre de plein de choses… Du parcours, par exemple, que je ne connais pas. Ce sera une découverte totale. Mais mon expérience de ces rendez-vous joue en ma faveur. Je sais à quoi m’attendre, contrairement à une bonne moitié du champ. Ce qui est sûr, c’est que je ne lâcherai rien. Comme d’habitude. Je n’ai pas fait tous ces efforts pour lâcher dans la dernière ligne droite. »

L'aide précieuse de Jean-Claude Forestier

Il pourra compter évidemment sur le soutien indéfectible de sa famille mais aussi celle de Jean-Claude Forestier. L’homme d’affaires – Le Petit Forestier et ses quelque 64 000 véhicules frigorifiques, c’est lui – et promoteur du Vaudreuil Golf Challenge, étape incontournable sur le Challenge Tour, a été l’un des principaux artisans de sa présence à cette finale du Korn Ferry Tour. 

« Il m’a aidé financièrement pour me présenter à ces Cartes, il m’a fait confiance, confirme Cyril Bouniol. J’ai pris la décision de m’y inscrire trois jours seulement avant la fermeture des inscriptions… C’est d’ailleurs Jean-Claude qui m’a conseillé de m’inscrire aux Cartes. Il m’a permis de me relancer. »

Jérémy, on s’entend bien tous les deux. C’est un mec cool

Pour ce dernier défi de l’année qui pourrait changer sa vie, Cyril Bouniol, 35 ans depuis le 11 août, ne sera pas le seul Français engagé. Il aura à ses côtés Jérémy Gandon, qui s’est qualifié le 14 octobre à Valdosta (Georgie) sur le parcours de Kinderlou Forest.   

« On a encore joué ensemble à Fort Worth vendredi dernier avec Paul (Barjon), conclut-il. Paul et moi, on vit à Fort Worth alors que Jérémy est à Dallas, à 45 minutes… Jérémy, on s’entend bien tous les deux. C’est un mec cool. Depuis que je suis aux States, ça fait à peu près 13 ans, j’ai souvent été seul, isolé. Là, ce serait top de voyager ensemble en 2023, faire les recos ensemble… J’espère que tout ça va se concrétiser ! »