Fin novembre, le Terre Blanche Lacoste Invitational réunissait le temps de deux jours, son ambassadeur Tom Vaillant ainsi que les joueurs du Team Elite du club éponyme varois. Un moment d’échange où les jeunes se sont improvisés journalistes aux questions plus que pertinentes.

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Tom Vaillant a partagé son expérience du monde pro avec les joueurs du Team Elite lors du Terre Blanche Lacoste Invitational. © Prakash Singh / Getty Images - AFP

Au cours d’une journée au caractère exceptionnel pour ses invités, le club de Terre Blanche (Var) accueillait dans son enceinte la première édition du Terre Blanche Lacoste Invitational. Une journée autour du jeu et de l’échange avec un professionnel du DP World Tour et ambassadeur de la marque au crocodile, Tom Vaillant. L’athlète de 23 ans qui a tout juste conclu sa deuxième année dans l’élite européenne et qui est déjà lancé dans le calendrier comptant pour 2026, a répondu lors de deux sessions différentes aux questions des invités dont faisaient partie les joueurs de la Team Élite du club. Baigné dans le haut niveau amateur, cette douzaine d’aspirants professionnels a profité de la compagnie de celui qui était à leur place quelques années plus tôt pour en apprendre plus sur ce monde dont ils espèrent un jour faire partie, mais aussi sur les préceptes à adopter pour y parvenir.

« Quelle est la plus grande différence entre le monde amateur et le monde pro selon ?
T.V : Je ne pense pas que la différence se fasse vraiment sur le niveau de jeu. Quelqu’un de fort, qu’il soit amateur ou pro, ça ne veut rien dire en soi. Le statut ne fait pas tout. En revanche, la vraie différence, c’est l’état d’esprit, la maturité sur le parcours, la capacité à organiser son entraînement. Tout ce cadre hors parcours est déterminant pour savoir si un joueur est prêt à se comporter comme un professionnel. Quand j’étais en équipe de France en amateur, on avait d’ailleurs une règle de vie très claire : se comporter comme un pro. Dans l’attitude, dans l’investissement, dans la manière de s’entraîner.

Pendant ton passage aux États-Unis (Tom Vaillant a fait partie des Arkansas State Red Wolves, ndlr), qu’est-ce qui t’a le moins plu ?
Il y a pas mal de choses qui ne m’ont pas plu. Déjà, j’étais vraiment au fin fond des États-Unis. Pour ceux qui ne voient pas où se trouve l’Arkansas, c’est littéralement au centre du pays, donc au milieu de nulle part. J’ai tout de même adoré la culture du sport, du dépassement de soi, de la compétition permanente pour intégrer l’équipe mais je n’ai pas du tout aimé le manque de projet individuel qui en découlait. Là-bas, le coach se focalise uniquement sur la performance de l’équipe. Le développement personnel du joueur passe clairement au second plan. J’ai eu un peu de mal avec ça, probablement parce que j’ai toujours été encadré depuis mes 13 ans, avec des coaches, des préparateurs mentaux et physiques, notamment grâce à la fédération. Là, je me suis retrouvé livré à moi-même à 8 000 km de chez moi. C’était très brutal, pas facile à gérer.

Lors de ta première année sur le DP World Tour, t’es-tu tout de suite senti à ta place ou as-tu été un peu spectateur en regardant les autres joueurs ?
Lors de mon premier tournoi le Hero Dubai Desert Classic, Rory McIlroy s’est mis à 1,20 mètre derrière moi sur le practice et j’étais littéralement en train de trembler. Donc oui bien sûr que j’ai regardé. Et c’est normal. Je me souviens aussi de ma première partie avec Nicolas Colsaerts : je lui ai dit que c’était un honneur parce qu’il était un illustre joueur. Et puis avec le temps, ces choses deviennent plus banales parce que l’on crée des liens. Aujourd’hui, Nicolas m’envoie un paquet de musiques à écouter par exemple. Il ne faut jamais renier l’inspiration que ces joueurs génèrent mais ce sont désormais des personnes que je côtoie et, surtout, que je veux battre dès que je les croise en tournoi.

Comment te définirais-tu sur le parcours en ce qui concerne les émotions ?
Je suis assez émotif. Et je pense que c’est important de le montrer quand c’est le cas parce que ça contribue à trouver son bon équilibre, ce qui est important avec les émotions. Certains joueurs sont dans l’extrême négativité, comme Tyrrell Hatton, mais ça leur permet aussi de rebasculer très vite sur le coup suivant. Et dans son cas c’est efficace. Mais il n’y a pas de recette magique. Chacun doit trouver sa manière de fonctionner.

Quand une partie de ton jeu se dérègle pendant un tournoi, à quoi te raccroches-tu ?
J’essaie d’abord de tout ralentir : ma marche, mon rythme. Ça me donne une sensation de contrôle. Ensuite, je simplifie tout au maximum. Je ne pense plus à la technique. Je me rappelle aussi que le golf, c’est 18 trous et qu’il peut se passer beaucoup de choses. Ce n’est pas parce que les deux ou trois premiers sont mauvais que tout est fini. Et surtout, je relativise. Même si je rends un 85, le soleil se lèvera quand même le lendemain et la famille sera toujours là. On ne contrôle pas tout surtout dans un sport qui consiste à envoyer une balle à 300 mètres, à 30 mètres de haut et avec du vent, de la pluie ou du froid. On peut bien faire les choses avant le coup mais après… c’est la loi du sport.

Ton ami Martin Couvra a remporté sa première victoire avant toi. Qu’est-ce que tu t’es dit à ce moment-là ?
Je ne l’ai pas jalousé mais je l’ai envié, ce qui fait une grande différence puisque c’est un sentiment plus sain selon moi. J’ai eu envie d’être à sa place, à gagner, à jouer dans des grandes parties… Quand il disputait le Scottish Open avec Morikawa et Hovland, j’étais à ce moment-là aux États-Unis (pour l’ISCO Championship, ndlr) et je me réveillais exprès pour regarder sa partie avant d’aller jouer la mienne. C’est pour illustrer à quel point c’était un moteur pour moi. La chose qui a été la plus dure a été l’écart de dynamique. Car lorsque lui s’est mis à très bien jouer, j’étais dans une période compliquée. Et en même temps, les médias me sollicitaient beaucoup pour parler de lui, en raison de notre proximité. Parce que, au-delà de tout ça, avec Martin ça dépasse largement le cadre du golf : c’est une des personnes les plus proches de mon entourage et, certes, il peut jouer 66 et gagner un tournoi, mais quand on se retrouve dans le même hôtel, on est toujours les deux mêmes potes à jouer à Mario sur la Switch. Au final, on se tire toujours vers le haut. Sans son début de saison, je n’aurais peut-être pas réussi à garder ma carte et peut-être que sans mes promotions sur les circuits, il n’aurait pas eu l’envie d’y arriver aussi. C’est une rivalité saine.