Niché au cœur de la réserve naturelle nationale de la plaine des Maures, le golf de Vidauban constitue un havre de paix pour la biodiversité locale, et notamment la tortue d'Hermann. Via sa fondation d'entreprise pour l'environnement et avec le concours du Muséum national d'histoire naturelle, le club œuvre depuis plus de dix ans à la préservation de cette espèce menacée d'extinction.

Environ 160 tortues d'Hermann vivent au golf de Vidauban (83). © Golf de Vidauban

Aisément reconnaissable à sa carapace jaune ornée de motifs sombres, la tortue d'Hermann est un animal emblématique de la biodiversité française : la sous-espèce occidentale, dénommée Testudo hermanni hermanni en latin, est en effet l'unique tortue terrestre de l'Hexagone. Jadis présente sur tout le pourtour méditerranéen, elle est aujourd'hui confinée à deux régions : la Corse d'une part, alors que sur le continent le département du Var, et plus précisément les massifs des Maures et de l'Estérel, constitue son ultime bastion. Le testudinidé a en effet vu son habitat se réduire à peau de chagrin depuis son premier recensement scientifique par le naturaliste allemand Johann Friedrich Gmelin en 1789, du fait de plusieurs facteurs qu'énumère Philippe Gourdain, responsable des partenariats sur la biodiversité à l'unité mixte de service Patrimoine naturel au Muséum national d'histoire naturelle (MNHN) : « La tortue d'Hermann subit énormément de pressions. Quand les incendies de forêt sévissent, elle est directement impactée du fait de sa capacité de déplacement assez faible et de son comportement territorial. Par ailleurs, il y a eu des aménagements importants d'infrastructures routières ces dernières décennies qui ont énormément fragmenté son habitat. L'extension de l'urbanisation et des surfaces viticoles lui ont aussi été défavorables. Enfin, comme c'est une espèce plutôt sympa à voir, beaucoup d'individus ont malheureusement été ramassés par des gens qui les ont mis dans leur jardin. »

Une fondation, trois missions

Classée en danger d'extinction sur notre territoire par l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) qui fait référence en la matière, la tortue d'Hermann a résisté par ses propres moyens jusqu'en 2009, année où l'État a créé la réserve naturelle nationale de la plaine des Maures. Et c'est au cœur de ce sanctuaire de plus de 5000 hectares que se trouve le golf de Vidauban, où l'animal vit encore plus sereinement, à l'abri des pressions évoquées. Dans ce club ultra-privé comptant à pleine plus d'une vingtaine de membres, il n'est pas rare de croiser des spécimens traversant tranquillement un fairway ou vaquant à leurs occupations en bordure d'un rough ! Convaincus de la nécessité de les protéger – au même titre que les nombreuses autres espèces animales et végétales de la plaine des Maures – les dirigeants ont créé en 2007 la Fondation d'entreprise du golf de Vidauban pour l'environnement. « Nous avons trois missions : mieux connaître, pour mieux préserver, et partager les connaissances avec le plus grand nombre », indique sa directrice générale, Catherine Fournil. « Nous avons réussi à collaborer avec les scientifiques du Muséum, et le directeur du service patrimoine naturel à l'époque, Jean-Philippe Siblet, m'a dit que "si on ne parvenait pas à travailler ensemble, cet environnement serait perdu pour la science." Nous avons signé une première convention en 2011 pour inventorier la biodiversité du site, et nous avons prolongé notre accord en 2017 avec comme objectif de mieux intégrer le parcours à l'environnement local. »

Le golf de Vidauban a fait de la tortue d'Hermann son logo.

160 individus à l'intérieur du golf

C'est dans le cadre de la première convention que les équipes du Muséum sont intervenues à Vidauban, afin de recenser de la manière la plus exhaustive possible la biodiversité des lieux. La tortue d'Hermann, en sa qualité d'espèce emblématique et menacée, a naturellement fait l'objet d'un soin particulier : « Depuis la loi de 1976 sur la protection de la nature, c'est une espèce intégralement protégée : on n'a absolument pas le droit d'y toucher ni d'altérer son habitat, mais sa situation reste très préoccupante. Donc, avoir des endroits encore accueillants pour ces tortues est un enjeu très important. Quand on a commencé à travailler là-bas, on s'est demandé si le parcours, par rapport au reste de la plaine des Maures, était défavorable ou non à ces populations », explique Philippe Gourdain. Un protocole de suivi de la population locale de tortues a été mis en place, qui a permis de recenser 160 individus au sein des quelque 100 hectares grillagés du parcours. « Ce sont des chiffres intéressants, car ils montrent qu'il y a une population de bonne taille à l'intérieur du golf », indique-t-il. « On avait aussi pu établir la présence d'une douzaine de sites de pontes à l'intérieur de la clôture. Enfin on a vu que cette clôture, justement, permettait aux individus les plus petits de circuler librement du golf vers l'extérieur, ce qui est aussi une bonne nouvelle. Dernière chose, qu'on n'avait pas anticipé, c'est que le parcours en lui-même constitue une zone de sécurité pour ces tortues, dans le sens où elles sont à l'abri des prédations d'animaux tels que les sangliers, qui aiment bien leurs œufs. »

Poursuivre les efforts

Mais de là à dire que la tortue d'Hermann est sauvée grâce au golf, il y a un pas de géant que même Gamera, la colossale tortue des films de monstres japonais, ne saurait faire : « Aujourd'hui, on ne peut rien affirmer par rapport à la menace d'extinction qui pèse sur elle », indique Catherine Fournil. D'où l'importance de poursuivre les efforts déjà entrepris sur le long terme, afin de réduire au maximum cette possibilité. Et c'est exactement dans cette optique que, par le biais d'ateliers d'éveil à l'environnement local, la Fondation sensibilise chaque année sept cents élèves des écoles de la commune à ce genre de sujet : pour permettre à la tortue d'Hermann, à son allure, de s'éloigner du risque d'extinction. « Si elle venait à disparaître, ça n'aurait peut-être pas de conséquences immédiates observables sur son écosystème, mais ce qui est sûr, c'est qu'on a tout intérêt à empêcher un tel scénario », conclut Philippe Gourdain.

Cette espèce est nommée en l'honneur du naturaliste et médecin Jean Hermann (1738-1800). © Golf de Vidauban

Parcours de biodiversité

Pour vous faire une meilleure idée de la richesse d'un golf en termes de biodiversité, nous ne saurions que trop vous recommander de consacrer une petite heure de votre temps au visionnage de ce remarquable film documentaire, réalisé justement au golf de Vidauban. Il vous permettra non seulement d'observer la tortue d'Hermann dans son environnement naturel, mais surtout d'appréhender la complexité et l'importance du travail de terrain réalisé par les scientifiques.

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