Chaque jour, la rédaction de la ffgolf vous présente le coup de cœur de l’un de ses membres. Aujourd’hui, la force de caractère de Pierre Pineau, par Lionel Vella.

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En ce tout début d’été 2022, l’actu golfique en Europe, ce sont ces qualifications dites « régionales » de The Open. L’open britannique si vous préférez. Le plus vieux des tournois du Grand Chelem. Trente-six trous à négocier ce mardi 28 juin sur quatre sites différents en Grande-Bretagne. Quatre fois quatre places à gagner pour participer au 150e British, programmé du 14 au 17 juillet à St Andrews. Le Saint des saints.

En consultant les différentes listes des engagés, quelle n’est pas ma surprise en découvrant qu’il n’y a qu’un seul golfeur français inscrit : Pierre Pineau. Sur le parcours de Prince’s, dans le Kent. Pourquoi ne sont-ils pas plus nombreux à tenter leur chance ? Plus de six mois après, je n’ai toujours pas trouvé la réponse à ma question…

Pierre Pineau, pas encore 23 ans. Élève de Guillaume Biaugeaud, il évolue sur l’Alps Tour. La troisième division européenne. On ne va pas se mentir, ses chances de se qualifier sont à ce moment-là infimes. Voire nulles. Mais parce qu’il est l’unique représentant tricolore, je décide de suivre via l’application du site officiel de The Open sa journée sur ce links ouvert aux quatre vents. On ne sait jamais. Surtout quand il est question de golf…

Après les dix-huit premiers trous avalés dans la matinée, il pointe à la sixième place avec un très solide 70 (-2). On tient peut-être ici la surprise du jour. Celui qui va accompagner Victor Perez en Écosse. Le Tarbais s’étant qualifié quelques semaines plus tôt en remportant le Dutch Open lors d’un play-off complètement fou face au Néo-Zélandais Ryan Fox.

Et la suite semble nous donner raison puisqu’il est -3 total après neuf trous dans sa seconde ronde, l’après-midi. Pierre Pineau se retrouve même co-leader à trois trous de la fin. Impossible désormais que l’un des quatre spots mis en jeu lui échappe ! Et pourtant... En adoptant une stratégie moins offensive, en voulant gérer ses acquis, en jouant contre nature – c’est ce qu’il m’avouera ensuite – le jeune golfeur français va vivre un véritable cauchemar. Parti du 10, il concède ainsi un bogey puis surtout un triple bogey sur son dernier trou avec notamment une balle perdue sur sa mise en jeu. Il prend finalement la 19e place à… +1. Ses rêves de St Andrews s’envolent. Définitivement. Cruel !

Une sacrée force de caractère

Sans trop y croire, je lui envoie par texto une demande afin de recueillir ses éventuelles premières impressions. S’il en a la force. Un peu comme une bouteille à la mer. Comment peut-on s’exprimer auprès d’un journaliste, qui plus est par téléphone, quand on vient de vivre un dénouement aussi terrible ? Pourtant, au bout d’une heure, son nom s’affiche sur mon mobile ! C’est lui. Il me rappelle directement. Sans passer par un sibyllin message écrit.

Au bout du fil, mon interlocuteur fait preuve d’une incroyable résilience. J’apprends aussi qu’il souffrait encore 48 heures auparavant d’une angine, que c’était la première fois en cinq ans qu’il affrontait un links… Forcément déçu, ce jeune homme me donne toutefois l’impression qu’il va trouver les ressources nécessaires pour rebondir. Vite. Cet échec évident va lui servir de leçon, il n’a aucun doute là-dessus. Dans son discours, il est tout simplement bluffant ! « Il y a plein de bonnes choses à retirer de cette expérience » lâche-t-il en guise de conclusion après un bon quart d’heure de conversation tout sauf larmoyant.

Cette désillusion s’est incontestablement transformée en élément fondateur. Alors quand il s’impose le 18 septembre au Portugal sur le Challenge Tour après une très belle 2e place en Autriche le 17 juillet – la semaine de The Open ! – je ne suis évidemment pas surpris. Combien auraient coulé à pic après avoir vécu ce qu’il a vécu ? Présent à la finale de la Road to Mallorca au début du mois de novembre, il a, depuis, prouvé qu’il faudrait compter sur lui dans les prochains mois, les prochaines années. Parti tout seul en Australie, il s’est par exemple payé le luxe de finir 10e à l’Australian Open le 4 décembre avant de prendre la 11e place finale à l’AfrAsia Bank Mauritius Open dans ce dernier rendez-vous en 2022 sur le DP World Tour. Une sacrée force de caractère !