La nouvelle championne de France Dames s'apprête, à 16 ans, à disputer son premier championnat d'Europe par équipes. Un aboutissement et un défi, pour cette joueuse à qui le goût de la compétition a été donné par une certaine Rose Zhang.

Giselle Zhao a beaucoup appris du jeu en match play en disputant, avec le RCF La Boulie, le trophée Golfers' Club. © Tomas Stevens / ffgolf

Parler avec Giselle Zhao, c'est parler de golf, bien évidemment. Mais c'est aussi évoquer Barbey d'Aurevilly, Lamartine, et même Diam's (on va y revenir). C'est surtout se surprendre à vérifier si même le téléphone, par contagion, ne se serait pas mis à sourire. Pas forcément besoin, pour cela, d'un titre national comme celui qu'elle a cueilli, dimanche dernier à Fontainebleau. Chez elle, le sourire et le rire sont en somme des états quasi permanents. Perpétuels. Sa semaine de championnat de France Dames ? Sourire. Sa future participation au championnat d'Europe par équipes Girls, du 8 au 12 juillet prochain en Angleterre ? Sourire. Son entrée, en août 2026, dans l'université Cal, autrement dit Berkeley ? Grand sourire. 

Facile, pour les bonnes nouvelles. Mais autre exemple : sa qualification moyenne, lors de la Coupe Gaveau, la semaine passée à Fontainebleau ? Sourire aussi. Il faut dire qu'une mésaventure propre à perturber une machine bien huilée était venue la troubler : elle avait oublié son marque-balle fétiche, aux couleurs de l'Augusta National Golf Club. « Je l'ai depuis mes 10 ans, explique-t-elle. C'est Thomas Levet qui avait ramené des petits cadeaux du Masters pour les enfants du RCF La Boulie, et il me l'avait donné. Je l'emmène à chaque tournoi. Et là, ma mère a dû me l'apporter le troisième jour. » Anecdote qu'elle narre, évidemment... dans un sourire.

 

Barbey d'Aurevilly : « Pas incroyable »

Il est difficile, il faut dire, de nier que le retour du marque-balle dans la poche de la joueuse de 16 ans n'a pas été concomitant avec un renversement de dynamique. Car après la phase qualificative, Giselle Zhao a enchaîné les bonnes performances dans la phase de match play. Après avoir battu son amie du RCF Justine Bayle au premier tour, elle s'offrait ensuite le scalp de la championne de France en titre en personne, Valentine Delon. Joueuse qui avait été sa partenaire de jeu lors des deux premiers tours, ce qui lui avait permis de voir la Cantilienne signer un très beau 64 (-8) sur le parcours de Fontainebleau. « J'ai fait cinq birdies sur le retour, et j'ai gagné 1 up », note Giselle Zhao, sans besoin de préciser avec quelle expression sur le visage.

Après une victoire en quart de finale face à Juliette Demeaux, puis une qualification pour la finale en battant une autre ancienne championne de France Dames, Pauline Stein, Giselle Zhao a retrouvé Manon Petitcolas, une joueuse de sa génération, et surtout sa future coéquipière dans l'équipe de France Girls. « Ça faisait quatre jours que je me réveillais tôt, c'était dur. Mais quand j'arrivais au golf de Fontainebleau et que je voyais le directeur qui était déjà là, ça m'aidait à me réveiller », se souvient-elle. Lors de cet affrontement sur 36 trous, un coup d'accélérateur sur le final de la première boucle, puis un trou gagné dès le 1 lors de la deuxième lui ont permis de prendre la main, pour ne plus la lâcher. Là sans doute, tout le travail effectué avec son coach Grégory Buisson et avec le directeur sportif du RCF La Boulie Grégory Cazal a porté ses fruits. « En début d'année, j'ai joué les internationaux d'Espagne puis la coupe Esmond, et à chaque fois, j'ai perdu à mon premier match, pointe-t-elle. Avec les deux Greg, on a fait toute une préparation là-dessus. Car c'est comme tous les autres compartiments du jeu : pour progresser, il faut s'entraîner. » 

Dans cette phase à élimination directe, Giselle Zhao s'est également beaucoup appuyée sur son expérience en Championnat de France par équipes, sous le maillot ciel-et-blanc. Déjà il y a deux ans, à Omaha Beach, elle prenait part pour la première fois au trophée Golfers' Club... et le soulevait pour la première fois, avant de connaître de nouveau cette heureuse expérience en 2024 à Chantilly. Sur ce point, elle est catégorique : « Sans la Golfers', je n'aurais jamais gagné le championnat de France individuel. Ça m'a appris énormément sur le match play. » L'autre bonne nouvelle étant que le championnat d'Europe par équipes Girls se déroule dans une formule de jeu quasi identique... à la Golfers'.

Mais la veille de s'envoler pour Slaley Hall le 4 juillet, la jeune Racingwoman, qui fêtera ses 17 ans en fin d'année, devra s'attaquer à une autre épreuve : l'oral du bac de français. Beau clin d'œil, sachant qu'elle avait passé l'écrit juste avant le démarrage de la coupe Gaveau. Pour l'anecdote, elle a y opté pour le commentaire de texte, en l'occurrence un extrait du chapitre 1 de L'Ensorcelée, de Jules Barbey d'Aurevilly, daté de 1854. Si elle s'est abstenue de faire part de son avis personnel sur ce texte sur sa copie, il est au demeurant assez tranché : « C'est pas incroyable, ça raconte une lande isolée en Normandie, il ne se passe pas grand-chose. » La lecture de quelques corrigés l'a plutôt confortée quant à sa note future, même si un grain de sable est venu se glisser dans sa conclusion : « J'ai voulu parler des Méditations poétiques de Lamartine, mais à la place, je me suis trompée, j'ai mis Confessions nocturnes ! ». Qui se trouve être une chanson interprétée par les chanteuses Vitaa et Diam's (elle était là !).

Le goût du golf, Giselle Zhao le cultive depuis bien plus longtemps qu'elle ne révise son bac. Lorsqu'elle était enfant, son père travaillant au golf de Fourqueux, près de Saint-Germain-en-Laye, elle passait naturellement du temps en compagnie des enfants du club. Mais une connaissance l'a plus particulièrement inspirée : Rose Zhang. À l'époque, l'Américaine n'est pas encore la double lauréate de tournoi sur le LPGA Tour qu'elle est aujourd'hui. En revanche, elle se rend en France pour jouer l'Evian Juniors Cup, au fameux resort haut-savoyard. Et elle se trouve être la fille d'un ami... du père de Giselle. « J'ai trouvé incroyable la manière dont elle jouait, se remémore la Française. C'est là que j'ai commencé à vraiment aimer le golf, et à vouloir tenter ma chance. »

Quelques années plus tard, en 2022, la Racingwoman a de nouveau croisé Rose Zhang, lors des Mondiaux amateurs par équipes, au Golf National et à Saint-Nom-la-Bretèche. L'Américaine était alors étudiante dans sa fac californienne de Stanford. Alors, pourquoi pas marcher dans ses pas ? Pour ce qui est de l'université, c'est mal parti. Car en s'étant engagée avec Cal, Giselle Zhao appartiendra à une fac où l'un des mots d'ordre, affiché sur les t-shirts, est le suivant : « Battez Stanford ! ».