Vainqueur consécutivement ces dernières semaines des championnats amateurs d'Afrique du Sud en stroke play et en match play, ainsi que de la qualification de ce dernier, Martin Couvra a écrit une page de l'histoire du golf dans la nation arc-en-ciel en devenant le premier joueur à soulever ces trois prestigieux trophées la même année. Avant de reprendre le chemin de l'entraînement la semaine prochaine, le Varois de 20 ans revient sur cette folle épopée sud-africaine et dévoile ses objectifs pour une année 2023 qui s'annonce bien remplie.

Le Varois devrait se rapprocher du top 60 mondial amateur ce mercredi. © Ernest Blignault / Golf RSA

Quelques jours après la fin de cette tournée sud-africaine triomphale, comment voyez-vous les choses avec un peu de recul ?
Je suis fier de moi, forcément ! Déjà, d'avoir gagné ces tournois, mais aussi dans une certaine mesure d'avoir marqué l'histoire de ce sport. Certes c'est à petite échelle, dans des tournois amateurs en Afrique du Sud, mais c'est cool. Et ça montre surtout que le travail est bien fait. Maintenant, il faut continuer comme ça.

Pour quelle raison avez-vous décidé de participer à ces tournois en Afrique du Sud ?
On a établi mon calendrier en fin d'année dernière avec mon staff. Comme j'ai décidé de rester amateur encore cette année, jusqu'aux Mondiaux à l'automne (18-21 octobre à Abou Dhabi, ndlr), il fallait que je trouve le moyen de jouer des tournois importants, avec de bons champs de joueurs et sur de bons parcours, histoire de poursuivre ma formation. Je vais faire des tournois pros un peu plus tard dans la saison, mais là c'était une belle occasion de jouer à haut niveau international chez les amateurs. Ces tournois sud-africains nous sont directement venus à l'esprit. Je les avais joués il y a trois ans et je savais déjà que ça se jouerait sur de très bons parcours, face à une concurrence très relevée. Donc c'était l'idéal pour me remettre dans le bain de la compétition en début d'année, après les deux que j'ai joués aux États-Unis avant et après Noël.

Avec le trophée du South African Stroke Play Championship. © Ernest Blignault / Golf RSA

Comment s'était déroulée votre tournée sud-africaine il y a trois ans ?
J'avais participé exactement aux trois mêmes tournois avec le pôle France de l'époque. L'African Amateur Stroke Play Championship se jouait déjà à Leopard Creek, mais pas les deux autres qui étaient au Royal Johannesburg & Kensington Golf Club. Évidemment, je ne les avais pas gagnés ! J'avais passé deux cuts sur trois. Au premier, j'avais fini 30e, et c'est amusant parce que j'ai fini 16e cette année et j'avais été déçu, alors qu'en 2020 j'étais content d'avoir fait 30e... Ensuite j'avais raté le cut du South African Stroke Play Championship, et perdu au premier tour de match play au South Africain Amateur Championship. Mais je n'avais que 17 ans à l'époque !

À votre avis, du fait du chemin que vous avez parcouru en trois ans, faisiez-vous partie des joueurs à surveiller cette année ?
Il y avait quelques noms connus dans ces épreuves, notamment Aldrich Potgieter, le dernier vainqueur du British Amateur, et quelques autres Sud-Africains qui jouent régulièrement les grands tournois internationaux amateurs. Donc il y avait quelques joueurs un peu connus dans le monde amateur, mais je ne pense pas qu'eux savaient qui j'étais ! Mais ce n'était pas plus mal d'arriver un peu incognito, et de toute façon le but quand on va jouer à l'étranger est toujours de montrer qu'on sait bien jouer au golf en France.

Olivier m'a clairement fait gagner pas mal de coups. Il m'apporte toujours quelque chose, que ça soit sur le parcours ou en dehors d'ailleurs.

Olivier Elissondo vous a caddeyé tout au long de cette tournée. C'est à votre demande qu'il vous a accompagné ?
En réalité, Mathieu Santerre (son entraîneur, ndlr) était avec moi lors de la première semaine à Leopard Creek, et Olivier l'a en quelque sorte remplacé à partir du deuxième tournoi. C'était une demande de ma part, oui, mais aussi une évidence pour tout mon staff, parce qu'il m'a beaucoup caddeyé l'an dernier et qu'il me connaît très bien. On apprend énormément en étant accompagné par quelqu'un de son expérience, et sur le terrain il fait gagner beaucoup de coups à celui qu'il caddeye, donc l'avoir avec moi ne pouvait qu'être bénéfique. Et ça a été le cas bien sûr ! Lors de la première semaine à Leopard Creek, où il n'était pas là, j'avais fait pas mal d'erreurs stratégiques, de mauvais choix, qui m'avaient coûté alors que mon jeu était quand même très correct. Donc quand il est arrivé, il m'a clairement fait gagner pas mal de coups. Il m'apporte toujours quelque chose, que ça soit sur le parcours ou en dehors d'ailleurs.

Avez-vous eu besoin de temps pour vous adapter aux parcours et à l'herbe ?
Oui et non, car j'ai trouvé que je m'étais fait assez rapidement aux conditions de jeu par rapport à il y a trois ans. Après, c'est peut-être aussi parce que j'ai évolué en tant que joueur, parce que mes compétences techniques se sont développées... Le plus dur, en réalité, c'était d'adapter mes yardages, car la température n'est pas la même qu'en France à cette période de l'année, et la balle vole forcément un peu plus loin. Surtout à Leopard Creek qui est un peu en altitude. Après, l'autre gros point nécessitant une adaptation était le grain sur les greens, et j'y suis très bien arrivé sur les deux derniers tournois à Mount Edgecombe.

Avec le trophée de la qualification du South African Amateur. © Ernest Blignault / Golf RSA

Que vous inspire le fait d'avoir marqué l'histoire du golf sud-africain ?
Déjà, rien que le fait de graver son nom sur un trophée, quel qu'il soit, c'est jouissif, mais encore plus sur des tournois chargés d'histoire comme ceux-là. J'ai vu par exemple qu'il y avait le nom d'Ernie Els sur le trophée du Stroke Play (à l'année 1989, ndlr), donc le fait de mettre le mien à côté de celui d'un mec qui a réellement marqué l'histoire du golf à l'échelle mondiale, c'est incroyable. Et surtout de le faire avec la touche Couvra, c'est-à-dire d'être le seul joueur dans l'histoire du golf sud-africain à gagner ces trois tournois la même année, c'est une immense fierté !

La victoire dans le golf n'arrive pas souvent, mais vous y avez goûté plusieurs fois ces derniers mois, entre la Murat et l'Open d'Arcachon en 2022 et ces trois épreuves sud-africaines. Vous y prenez goût ?
Quand on gagne une fois, on ne veut plus s'arrêter ! Je travaille pour ça, je mets des choses en place pour y arriver le plus souvent possible, parce que j'ai envie que ça continue. Le fait d'en avoir gagné trois de suite montre aussi que le travail spécifique que je fais avec Mathieu Santerre, David Baudrier (son préparateur physique, ndlr) et Makis Chamalidis (son préparateur mental) porte ses fruits. Que ça soit à la fin du Stroke Play, même si j'ai gagné avec pas mal d'avance, ou sur la finale de l'Amateur en match play, ce travail qu'on fait pour arriver à être performant dans les moments décisifs a été crucial. Ça a d'ailleurs été une petite victoire personnelle, parce que le break hivernal est d'habitude un point faible pour moi : j'appréhende beaucoup cette période car il n'y a pas de tournoi, donc le fait de jouer sous pression me manque, et je mets toujours du temps à retrouver cette sensation du couteau entre les dents. Mais cet hiver, on a réussi à trouver des outils pour s'entraîner de cette manière, et je suis arrivé rapidement à me mettre en condition et à tenir sur la durée sous pression.

Avec le trophée du South African Amateur, entouré par sa famille et son caddie, Olivier Elissondo. © Ernest Blignault / Golf RSA

La victoire au South African Amateur a été assortie d'une belle récompense : une place au prochain open d'Afrique du Sud, sur le Tour européen...
C'était une grosse surprise, car je l'ai appris à la remise des prix ! Je ne sais pas si ça se passe comme ça tous les ans pour le vainqueur, mais je n'étais pas du tout au courant de cette récompense et j'ai donc joué tout le tournoi sans le savoir. Donc c'est top ! J'ai hâte d'y être, mais le seul problème est qu'il faut rester amateur pour bénéficier de cette invitation. Et comme j'avais prévu de passer pro après les Mondiaux qui sont en octobre, et que l'open d'Afrique du Sud est début décembre, il va falloir que je voie comment ça se goupille.

Quelles sont vos options ?
Si j'arrive à attraper une catégorie sur le Tour européen en cours d'année, que ce soit par le Challenge Tour ou un autre moyen, je pourrai renoncer à cette invitation mais jouer malgré tout le tournoi en tant que pro par ma catégorie. Si ce n'est pas le cas, je pense que je retarderai mon passage pro de quelques semaines pour finir ma carrière amateur sur une belle note au SA Open.

Il y a beaucoup de tournois importants à venir ces prochains mois, qui peuvent m'apporter beaucoup pour la suite de ma carrière. Je vais jongler entre ces deux mondes, et c'est vraiment cool !

À quoi va ressembler votre calendrier en 2023 ?
Le mois de mars va être un poil plus creux que le reste, car je risque de ne faire qu'un tournoi sur l'Alps Tour à la fin du mois. Ensuite, début avril je jouerai le championnat de France pro au Golf du Médoc, puis la Nations Cup en Espagne, et enfin je démarrerai la partie importante de ma saison chez les pros, sur le Challenge Tour. Je devrais bénéficier de sept invitations au total, donc je vais me concentrer à fond là-dessus pour essayer d'attraper un droit de jeu sur le Tour européen l'an prochain. À côté de ça, je vais jouer pas mal de grands tournois amateurs, comme le championnat d'Europe individuel, le British Amateur, le Western Amateur, et - si j'arrive à y rentrer - l'U.S. Amateur, qui peuvent offrir des places pour des tournois pro et notamment des Majeurs. L'U.S. Amateur est un gros objectif, car j'aimerais bien passer pro en l'ayant sur mon CV. C'est un Majeur amateur, Tiger Woods l'a gagné trois fois, il n'y a que des stars au palmarès, donc ce serait génial de le jouer avant de quitter le monde amateur. Et pour cela, il faut être dans le top 50 du classement mondial (WAGR), et je n'y suis pas encore, donc à moi de continuer à bien jouer pour monter au classement ! Enfin je n'oublie pas, évidemment, les compétitions par équipe qui me tiennent à cœur, comme les championnats d'Europe et les Mondiaux. Donc il y a beaucoup de tournois importants à venir ces prochains mois, qui peuvent m'apporter beaucoup pour la suite de ma carrière. Cette année, je vais jongler entre ces deux mondes, et c'est vraiment cool !