Alors qu’il dispute le second tournoi organisé dans les contrées d’Abou Dabi, Oihan Guillamoundeguy revient sur des premiers mois pas toujours guillerets vécus sur le Challenge Tour. Toujours fidèle à lui-même, toujours plein de métaphores et d’allégories.

D'aucuns diront qu'il attend sa montée sur le DPWT, d'autres qu'il pose pour une peinture façon Louis XVI. © Luke Walker / Getty Images - AFP

Voilà un premier chapitre de la saison presque terminé. Avec la deuxième et dernière date réunissant les hommes du Challenge Tour à Abou Dabi à l’occasion de l’UAE Challenge, Oihan Guillamoundeguy est à la conclusion de la tournée intercontinentale qu’ont été les trois premiers mois de l'année. Juste avant cette échéance et à peine sorti de l'Abu Dhabi Challenge, le Landais a pris le temps de tirer les premières leçons de la découverte de son nouveau circuit : « J’ai réalisé à quel point il fallait être rigoureux dans ce métier. Donc je me suis mis au boulot, tout simplement. »

En réalité, cette prise de conscience trouve sa genèse à la fin de l’année précédente. En lice pour la finale de l’Alps Tour et alors pressenti pour monter sur la division supérieure, le joueur de 19 ans s’est vu à plusieurs reprises sortir mathématiquement du top 5 qualificatif. « Une piqûre de rappel », synthétise-t-il avant de développer non sans ironie : « J’étais un branleur à l’entraînement jusqu'à présent. Mais un bon branleur, puisque je faisais le minimum et que ça fonctionnait sur l’Alps Tour. Alors après la finale, j’ai décidé de m’y mettre vraiment. »

Le pointage des heures

Courant novembre, à l’orée de l’intersaison, il décide donc de se rapprocher de Pierre-Jean Cassagne, co-sélectionneur de l’équipe de France Boys et coach à la Whales Biarritz Academy, tout en continuant son travail technique avec René Darrieumerlou. « J’avais une grande confiance en "PJ", je savais qu’il pouvait m’apporter beaucoup dans tout ce que je n’avais pas : la rigueur, l’organisation, la programmation. » Mais avant de s’engager avec le jeune, le technicien lui pose une condition : un mois de test au terme duquel le joueur doit montrer son investissement, sans quoi leur collaboration n’aurait pas de long avenir. « J’ai suivi ses instructions à la lettre et aujourd’hui ça continue », sourit le professionnel d'un an et demi d'âge.

Voilà donc depuis cinq mois un Oihan Guillamoundeguy qui a tout du parfait salarié d’entreprise. Un planning avec des heures à respecter, un pointage à effectuer et, en somme, des comptes à rendre. « Il a mis en place un tableau Excel avec deux versions : un pour les semaines d’entraînement et un pour les semaines de tournoi. Dessus, je retrouve le nombre d’heures que je dois passer au putting, au chipping, celles consacrées à la perf' et celles dédiées au parcours. Et moi, j’organise ensuite mes jours en fonction des contraintes que je peux avoir comme la météo ou des rendez-vous et, surtout, je remplis aussi mes heures pour qu’il voit ce que j’ai fait », détaille l’élève pour prouver son assiduité. Et rapidement, celle-ci fait son œuvre. Les performances s’améliorent à l’entraînement, l’aisance s'installe chez le joueur et les attentes en vue de la saison gagnent en ambition.

Ne manque plus que le carnet de correspondance. © ffgolf

La claque des premiers tournois

Malgré ses envies, le rookie du Challenge Tour est vite ramené à la réalité des résultats : trois cuts manqués pour les trois premiers tournois de l’année. « Ça a été très dur à encaisser, concède-t-il. Le combo rookie-appréhension de la saison-missed cut m’a fait très peur… Un soir du troisième tournoi, en Afrique du Sud, j’étais seul dans ma chambre, loin de la famille et des copains et je me suis mis à chialer parce que je me posais des questions. » Des doutes qui laissent transparaître une certaine fragilité, bien que très vite relativisée par sa lucidité et sa maturité pour un homme d’à peine 20 ans. « Je ne sais pas s’il y a lien avec ma qualité d’entraînement des années précédentes, peut-être. Mais ce qui est sûr, c’est que je ne peux pas faire une carrière entière sans avoir un programme physique, une planification et la rigueur pour appliquer tout ça. Et le top 5 en Inde a été la preuve qui m'a fait beaucoup de bien. »

Car à la fin du mois de mars, son investissement lui apporte son premier très bon résultat. Dans la foulée, l’actuel 36e joueur de la Road to Mallorca enchaîne avec la même performance au Championnat de France professionnel MCA. Une bonne série qui se prolongeait encore lors des deux premiers tours de la semaine passée, où le Landais était dans les clous du cut. Mais le samedi, une infection de l’œil gauche est venue jouer les trouble-fêtes. « J’ai rendu +3 le samedi, donc autant dire que sur un parcours où une carte de -1 faisait perdre des places, ça n’a pas pardonné. » Sa 72e place finale lui a tout de même apporté quelques points à l’ordre du mérite, ceux qui lui permettront d’assurer la carte et pourquoi pas de viser un top 20 pour grimper sur la première division européenne. « Les points, les quelques bons résultats, le gros de la saison qu’il reste à jouer… Tout ça me fait dire que le démarrage n'est pas si mal, finalement. »

Un circuit bien cerné

Excité à l’idée d’aborder les tournois européens pour y retrouver un type d’herbe qu’il apprécie et des parcours qu’il connaît mieux, Oihan Guillamoundeguy y arrivera fort d’autres apprentissages de ce circuit qu’il espère éphémère. Au détour de discussions et de chambres partagées avec des joueurs plus expérimentés que sont Benjamin Hébert, Alexander Lévy ou encore Félix Mory, il affine chaque semaine sa manière d’aborder les tournois et les trous pour être plus décisif. Et à force de côtoyer ses compatriotes tout comme ses adversaires, il en découvre davantage de rouages. « D’un côté, j’ai eu mon temps d’adaptation sur des parcours mieux préparés avec des greens plus durs ; et de l’autre j’ai compris que tout le monde pouvait vraiment gagner sur ce circuit. Il peut y avoir des mecs de 35, 40 ans avec des swings en mousse, mais qui sont des rats qui ont faim de la gagne (sic). Et ils se connaissent bien, ils savent quand être agressifs parce qu’ils sont dans une bonne semaine comme ils savent prendre leurs points dans une semaine où le jeu n’est pas au rendez-vous. C’est ce qui fait que le niveau est bien plus dense que sur l’Alps Tour. » Alors, comme une case de plus dans son planning, lui aussi travaille à mieux se connaître. Pas pour être un rat de 35, 40 ans qui a faim de la gagne, mais bien plus probablement pour être un joueur de 20 ans promu sur la première strate des tours européens.