L’une des étapes de la construction de parcours les plus méconnues et pourtant primordiales, est l’élaboration du routing plan. Il s’agit de l’une des phases les plus difficiles et subtiles et qui va s’avérer déterminante dans l’impression laissée par le tracé.

Le golf du Kempferhof dessiné par Robert Von Hagge. © Flygolf

Le routing plan correspond à l’enchainement des trous, en d’autres termes à l’itinéraire du parcours. Il s’agit d’un véritable art qui s’apparente à un puzzle et requiert tout le talent et la créativité de l’architecte. Tel un peintre devant sa toile, l’architecte doit trouver l’inspiration pour visualiser et concevoir la façon optimale dont les trous vont se déployer et dont va se dérouler ce "voyage".

Les différents objectifs d’un routing plan

Harmonieux et naturel

Un routing plan de qualité doit avant tout s’avérer harmonieux et naturel pour se fondre dans son environnement. Tous les éléments de la construction (départs, fairways…) se mettent en place alors intuitivement et les mouvements du terrain s’intègrent parfaitement sans avoir à bouger des milliers de mètres cubes de terre. Ainsi, les célèbres architectes américains, Bill Coore et Ben Crenshaw, qui possèdent cinq parcours dans le top 100 mondial, recherchent d’abord le cheminement instinctif des lapins et moutons présents sur la propriété pour découvrir les meilleures routes possibles. Le terrain doit dicter l’ordre naturel des trous et non pas l’inverse. Dès lors, les trous se correspondent, forment un ensemble mais aussi correspondent à la topographie ; ce qui nécessite de réfléchir non pas en deux mais en trois dimensions. Les ondulations existantes du terrain seront par exemple reproduites et le drainage naturel permettra de séparer les parties hautes des parties basses.

Dans cette quête d’harmonie, les architectes repèrent en premier lieu les greens et les départs qui constituent majoritairement les points dominants du terrain.

Le routing plan du célèbre parcours de Friar’s Head dans l’état de New York et dessiné par Coore & Crenshaw. © DR

Une séquence de trous cohérente, fluide et variée

La séquence des trous doit également être cohérente, fluide et variée pour insuffler du rythme et de la respiration aux golfeurs. Autrefois, les golfs ne disposaient pas de practice donc il était d’usage de démarrer par un premier trou facile afin de permettre aux joueurs de s’échauffer mais aussi de fluidifier le jeu et de ne pas bloquer le départ du 1. De même, il ne sera pas toujours souhaitable d’enchainer les trous difficiles mais au contraire d’intercaler des possibilités de pars voire de birdie pour permettre de reprendre son souffle.

Il faudra aussi varier la longueur des trous et notamment ne pas proposer deux par 3 ou par 5 de suite pour également conserver l’intérêt des golfeurs tout au long de la partie. Ainsi sur les parcours de bord de mer, il est fréquent de démarrer et de terminer par des trous le long de la côte alors qu’il peut être souhaitable de surprendre les golfeurs. Les trous « allers-retours » dans un sens puis dans l’autre, prévisibles et forts monotones, seront aussi à éviter.

Une séquence des trous appropriée permettra d’utiliser généralement les pars 3 pour lier des trous lorsque la topographie s’avère plus sévère et pour mettre en avant la beauté et les particularités de certains emplacements du site. Elle évitera aussi d’avoir des liaisons trop longues à marcher entre les trous. La cohérence et la recherche du plus grand confort pour les joueurs imposent d’éviter le soleil levant dans les yeux au trou numéro 1 et le soleil couchant en fin de partie.

Variété des angles d’attaque

De même, les angles d’attaques devront différer tout au long du parcours pour tester toutes les aptitudes des golfeurs et échapper aux redondances.

Sur les tracés exposés au vent, l’architecte s’ingéniera à ce que le vent ne souffle pas constamment du même côté. Au golf de Portmarnock en Irlande, une prouesse architecturale fut réalisée en 1896 lors de sa création puisque le vent souffle dans une direction différente sur l’ensemble des 27 trous.

L’ingénieux routing du golf de Portmarnock près de Dublin (à ne pas confondre avec Portmarnock Links situé juste à côté !) © DR

La magie et le mystère du routing plan

Il n’existe pas de formule magique ou de règle clairement défini, c’est ce qui fait toute la beauté et le mystère du routing plan. Il n’en demeure pas moins que seul un architecte talentueux, ayant passé du temps sur le site pour s’en imprégner et évaluer toutes les possibilités, sera en mesure de proposer un routing naturel, varié et qui conserve l’enthousiasme des golfeurs tout au long des 18 trous.

Le parcours de Chantilly est l'illustration parfaite de la magie du routing plan. © DR

Kristel Mourgue d'Algue, qui est-elle ?

Ancienne joueuse du circuit européen qu'elle a rejoint après avoir emporté le titre de championne universitaire américaine, Kristel Mourgue d'Algue est aujourd'hui copropriétaire du Grand Saint Émilionnais Golf Club et consultante pour la chaîne Golf+.