Joint par téléphone une dizaine de jours après son retentissant succès à la Biarritz Cup by C&S Partners, Victor Dubuisson est revenu sur cette parenthèse forte en émotions, tout en décrivant son amour pour le coaching, activité qui l'occupe à plein temps depuis deux ans.

Notre tentative pour le joindre, au lendemain de sa sensationnelle victoire à la Biarritz Cup by C&S Partners le 27 juillet dernier, n'avait hélas pas abouti, malgré la promesse d'un coup de fil dans la soirée. Dix jours plus tard, à notre plus grande surprise, le téléphone sonnait, et un Victor Dubuisson tout sourire entamait la conversation en s'excusant du délai : « Après Biarritz, je suis rentré à Tenerife le soir même et j'ai enchaîné directement sur une semaine de stage avec un groupe de clients... Je n'ai pas eu une minute à moi. » Tout vient à point à qui sait attendre : ce soir-là, l'ancien 15e joueur mondial en avait une grosse trentaine à nous consacrer !

Pouvez-vous expliquer les raisons qui vous ont conduit à jouer un tournoi professionnel pour la première fois depuis près de deux ans ?
J'ai rencontré Gérald Bouhourd, le président de C&S Partners, sponsor titre de la Biarritz Cup cette année, à l'occasion d'un séjour que j'ai organisé l'an dernier à St Andrews. On a énormément sympathisé pendant ces quelques jours, et il m'a expliqué qu'il soutenait plusieurs joueurs et joueuses dans leur carrière via la C&S Golf Team. Il est ensuite venu plusieurs fois à Tenerife avec des joueurs à lui, notamment Anthony Grenier, Nathan Trey ou Paul Elissalde. L'an dernier, j'ai accepté à sa demande de jouer le pro-am de la Biarritz Cup, pour partager un moment avec des jeunes du club, mais je n'avais pas participé à l'événement proprement dit puisque c'était encore un tournoi uniquement amateur. Cette année, ils ont décidé de le transformer en tournoi pro, et puisqu'il en était le sponsor principal j'ai dit oui quand il m'a demandé de venir le jouer.
Aviez-vous déjà joué la Biarritz Cup lors de vos années en tant qu'amateur ?
Oui, je l'avais jouée il y a très longtemps, quand j'avais 15 ou 16 ans... C'est loin, tout ça ! (rires)
Comment s'est déroulée votre semaine ?
J'ai d'abord fait le pro-am, à nouveau avec des jeunes du club, qu'on a d'ailleurs gagné ! C'était une journée pas facile, avec beaucoup de vent, mais on a bien joué. Et ensuite, il y a eu la Biarritz Cup en elle-même. Ça faisait longtemps que je n'avais pas joué de tournoi pro, donc j'étais content de pouvoir enchaîner quelques parties en me concentrant vraiment à 100 %. Gérald a un peu arrangé les parties pour que je joue avec un jeune du golf de Biarritz Le Phare qui est très, très bon (Anthony Nadal, ndlr) et un pro qui fait partie de sa team (Augustin Holé), et comme Augustin et moi avons fait les mêmes scores sur les deux premiers tours, on a joué le troisième ensemble aussi ! C'était vraiment super.

Avez-vous réussi à vous remettre rapidement dans la peau d'un joueur professionnel ?
Avec les séjours que j'organise depuis deux ans et demi, je m'entraîne beaucoup puisque je joue tous les jours ! Mais j'étais content de voir que même en compétition, avec un peu de tension, je pouvais toujours scorer. Je suis venu avant tout pour être avec Gérald et voir ses joueurs, mais en prenant le départ le premier jour je n'avais qu'une envie, c'était de bien jouer. Quoi qu'il arrive, j'allais avoir un peu de pression, et ces circonstances m'ont permis de me concentrer à 100 %. Et j'ai vu que depuis mon arrêt, j'avais énormément progressé sur beaucoup de compartiments de mon jeu, et que même si le putting n'était pas forcément au rendez-vous, j'arrivais quand même à être compétitif.
(Journaliste incrédule) Vous considérez avoir progressé depuis que vous vous êtes retiré du circuit ?
Le parcours d'Abama, où j'ai mon académie et sur lequel je joue toute l'année, est extrêmement difficile. C'est l'un des plus durs que j'ai joués en Europe, avec des greens ultra-rapides, fermes et pentus, et il m'a clairement permis d'élever mon niveau de jeu. Le fait de m'entraîner quotidiennement là-bas me fait dire aujourd'hui que j'ai progressé et que je joue beaucoup mieux que lors de mes dernières années sur le circuit. Il manque encore un peu de putting, car comme je me suis habitué à putter sur ces greens très rapides, fermes et pentus, et sur une herbe différente, j'ai un peu de mal à m'adapter quand je joue ailleurs. Mais le grand jeu était vraiment très bon.
Vous attendiez-vous à jouer les premiers rôles dans ce tournoi ?
Je n'avais pas trop d'attentes. Je voulais juste taper les meilleurs coups possibles, sans trop penser au résultat, et rester dans mon rôle de coach vis-à-vis des autres joueurs. Mais une fois que j'avais un coup à taper, je le tapais à 100 % et j'essayais toujours de faire de mon mieux.
Avez-vous retrouvé rapidement les habitudes de la compétition ?
Oui, bien sûr ! Comme à l'entraînement je reste toujours dans les routines que j'avais quand j'étais sur le circuit, j'ai gardé ces automatismes, donc à Biarritz c'était complètement naturel. Je joue vraiment tous les jours, et tous les jours des parcours, donc c'est resté.

Il y a eu un dénouement incroyable avec ce play-off que vous êtes allé chercher en rentrant un long putt pour birdie au 18...
Comme je disais à Gérald, qui me caddeyait, j'ai eu tellement de putts qui sont passés pendant le tournoi que je sentais que celui-là allait rentrer ! Du coup j'en ai mis un peu plus et il est rentré de justesse, après un bon 7 mètres.
Gagner ce play-off, ça devait être fou ?
En partant en play-off, je n'avais pas plus de stress que ça, car on sait que c'est 50/50 dans ces moments-là. J'ai essayé de taper les meilleurs coups possibles, surtout au 1 où la mise en jeu était très difficile avec un fort vent gauche-droite. Je n'ai pas mis le birdie, donc au 2 j'ai essayé d'être un peu plus offensif sur la mise en jeu pour me laisser un petit coup, car c'était le drapeau le plus difficile du tournoi, sur un petit plateau en haut. Je me suis laissé un deuxième coup de 50 mètres et je me suis ensuite mis donné, donc c'était le dénouement parfait, on va dire.
Ça fait quoi de gagner à nouveau ?
Personnellement, j'étais content, bien sûr ; mais j'étais surtout très heureux pour Gérald, car c'est vraiment pour lui que je me suis motivé. Quand j'ai vu que j'avais l'opportunité de gagner, avec lui sur mon sac, dans son tournoi, dans son club, je me suis dit que le scénario n'aurait pas pu être mieux écrit, et qu'il fallait que j'y mette le point final. On a soulevé la coupe ensemble, et honnêtement c'est plus ces moments de partage qui m'ont fait plaisir que le fait de gagner pour moi-même. C'est quelqu'un que j'apprécie énormément, on a aujourd'hui une relation d'amitié très forte, donc j'étais ravi que ça se finisse comme ça pour lui et pour le tournoi. D'autant plus qu'il y avait une très belle ambiance, beaucoup de monde le long des fairways pour suivre, et c'est de très bon augure pour faire une édition encore plus belle l'an prochain.
Il y avait d'ailleurs Alexander Levy et Martin Couvra parmi les spectateurs...
Oui, ils étaient là en vacances et ils sont venus voir un peu de jeu. Avec Alex, on est très amis, c'est de lui que j'ai toujours été le plus proche chez les pros, et c'était vraiment sympa de passer un peu de temps ensemble car ça faisait longtemps qu'on ne s'était pas vus. Quant à Martin, que je ne connaissais pas vraiment, c'était sympa de rencontrer un autre vainqueur du Turkish et de rigoler ensemble.
Votre refus d'empocher le chèque destiné au vainqueur a marqué les esprits. Comment cette idée vous est-elle venue ?
C'était le deal dès le départ. Comme c'est un tournoi de l'Alps Tour, et plutôt vers la fin de saison, les points sont précieux pour les joueurs qui sont membres de ce circuit. Moi, je ne joue plus pour un classement, donc c'était la condition préalable pour que je joue la Biarritz Cup : que je ne prenne pas d'argent et de points aux autres. J'avais demandé à être sorti du classement officiel car c'est très serré pour eux, surtout à cette période de l'année. Je ne voulais pas que ça nuise à leur saison. J'aurais été trop gêné d'empêcher la personne derrière moi de marquer quelques points supplémentaires, même si j'avais fini 20e ou 30e.
Ce geste a fait couler de l'encre jusqu'aux USA...
C'est vrai qu'il y a eu pas mal de médias américains et britanniques qui m'ont contacté suite à la Biarritz Cup, j'en connaissais certains de l'époque et c'était très sympa de leur parler à nouveau.
Est-ce que ça vous titille de rejouer de temps à autre des tournois pros ?
Pour l'instant, non... (Il réfléchit) Pour l'instant, non, je ne suis pas du tout dans l'optique de rejouer... Je suis vraiment focalisé sur le coaching et les séjours de golf. J'ai une académie à Abama, j'en démarre une nouvelle en octobre, donc je suis vraiment focalisé sur ces projets. Peut-être que je ferai un ou deux tournois de temps en temps, mais pour le moment ce n'est pas dans mon programme.
Comment s'est montée cette académie ?
J'ai démarré les séjours de golf à Tenerife il y a deux ans, principalement l'hiver, et l'été je tourne beaucoup dans les îles britanniques entre St Andrews, le K Club, Gleneagles, Adare Manor, etc. Petit à petit, à force d'améliorer les infrastructures, le practice, on a décidé avec Brendan Breen, le directeur d'Abama qui s'est énormément impliqué, de faire une vraie académie. Il y avait déjà une très bonne base, à partir de laquelle on a monté en gamme les infrastructures. On a refait les planches sur herbe avec des tontes différentes, trois grands greens pour taper, deux putting greens, un practice immense. Donc c'est bien car on peut s'entraîner en situation de jeu, avec des zones de la même qualité que ce que l'on retrouve sur le parcours. Le fait d'avoir des Pro V1 au practice fait aussi la différence. Au-delà du coaching, les gens sont contents de venir dans un endroit d'une telle qualité, comme il en existe peu en Europe. À Abama, il y a deux super hôtels sur le golf, avec des grandes suites, donc c'est hyper pratique et convivial. Tout est sur place, l'hôtel, le golf, la plage, le spa, les restaurants, donc les gens peuvent passer la semaine sans sortir du resort et se concentrer à fond sur le golf car il n'y a vraiment aucune contrainte.
Et donc, vous proposez des séjours de golf à qui veut ?
Exactement : n'importe qui peut s'inscrire pour des séjours d'une semaine, du samedi au samedi. Je ne fais que des petits groupes de deux ou trois personnes pour qu'on joue tous les parcours ensemble, sans séparer les parties. C'est beaucoup mieux d'un point de vue coaching car c'est plus intimiste et convivial. Je ne fais pas de séjour adultes pendant les vacances scolaires, je bloque les dates pour des enfants qui viennent avec leurs parents. C'est vachement sympa car les jeunes sont ensemble et passent une super semaine !
Comment se déroulent les journées lors de ces stages ?
En général, on joue le parcours le matin, et l'après-midi est consacrée aux entraînements. Chacun fait à son rythme, il n'y a pas d'heures fixes car les entraînements sont individualisés : je ne fais pas d'ateliers de groupe. Je passe du temps avec une personne au grand jeu, avec une autre au petit jeu, avec une autre au putting, etc. Chacun est dans sa bulle, et c'est ça que les gens aiment dans le coaching, plus que d'être nombreux dans des groupes où chacun fait la même chose.
Quel est votre rythme de vie à l'année ?
Je passe tout mon temps à Abama l'hiver, et à partir de mai je vadrouille en Europe, principalement au Royaume-Uni, pour profiter du beau temps là-bas et permettre aux clients de découvrir les parcours mythiques. Ce sont des endroits où j'adore aller car j'ai des facilités là-bas, c'est super pour s'entraîner et les parcours sont fantastiques. C'est super d'avoir ce mix entre l'hiver à Abama et l'été dans les îles britanniques.
À quel point prenez-vous du plaisir dans ce que vous faites ?
C'est vraiment une passion ! Et ce, quel que soit le niveau du joueur. C'est tout le temps passionnant : je prends autant de plaisir à aider les gens de différents niveaux à atteindre leurs objectifs, que ce soit un pro qui veut gagner sur le circuit, un joueur négatif qui veut passer pro, un 7 de handicap qui veut jouer négatif ou un 18 d'handicap qui veut jouer sous les 10. C'est le même plaisir dans chaque cas.
La vie est belle ?
Absolument ! Tout se passe bien, les gens sont heureux de l'expérience et ça me rend heureux. Je donne énormément de mon temps et de mon énergie, et quand ça paie dans la progression des joueurs que j'entraîne, c'est une grande satisfaction personnelle.
Les demandes de stage ont, paraît-il, explosé suite à votre victoire à Biarritz...
Il y en avait déjà beaucoup et de manière assez régulière, et malheureusement je ne peux pas prendre énormément de monde sur l'année puisque je fais des petits groupes. Mais je me tiens à cette ligne de conduite pour que les gens fassent la meilleure semaine possible. Mais là, après Biarritz, c'est vrai que les demandes ont encore augmenté... Ce n'est pas facile à gérer, mais ça va. C'est le genre de problème qu'on aime bien avoir ! Ce que je ne veux pas, c'est refuser trop de monde, parce que j'ai envie de faire plaisir à tout le monde. J'essaie d'organiser au mieux, et même si il y a un an ou un an et demi d'attente, j'essaie de faire en sorte que le maximum de gens puissent profiter de cette expérience. C'est sûr que le fait de faire des petits groupes limite le nombre, mais je n'ai pas envie de baisser la qualité.
Vous disiez que vous alliez ouvrir une deuxième académie ?
J'ai amélioré et renouvelé celle d'Abama, et j'ai comme nouveau projet d'en ouvrir une nouvelle à l'étranger. Pour l'instant je n'ai pas le droit d'en parler, mais ça viendra dans pas longtemps !

Les Bleus en stage à Abama ?
Des membres des équipes de France amateurs devraient venir s'entraîner l'hiver prochain à Abama au côté de Victor Dubuisson, nous indique ce dernier : « Ils ont l'habitude d'aller aux États-Unis, ce qui est super évidemment ; mais là, à Tenerife, il y a une super académie avec des infrastructures parfaitement adaptées à leurs besoins, et c'est seulement à quatre heures d'avion de Paris. Et en plus ils sont tout seuls ! »
Son de cloche confirmé par Grégory Havret, responsable de la filière Messieurs au sein de la Fédération française de golf : « J'ai vraiment envie que nos espoirs aillent s'entraîner avec Victor à Tenerife, tout comme j'aimerais qu'ils aillent passer du temps avec Matthieu Pavon en Floride ou avec Alexander Levy à Dubaï. J'ai envie qu'on se serve de ces champions pour permettre aux jeunes de progresser plus vite. C'est le genre d'initiative qui me tient à cœur, et même si ce n'est pas encore totalement concret, Victor est carrément chaud pour que ça se fasse, probablement en février ou mars 2026. »
Plus d'infos sur les séjours golf avec Victor Dubuisson