Dans cette nouvelle série, nous abordons les questions les plus souvent entendues dans la bouche des profanes du jeu de golf. Ce premier épisode est consacré à la distance sur laquelle les humains sont capables de faire voyager une balle de golf… histoire de frapper fort d’entrée.

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Tiger Woods (ici en 2024) a été le principal symbole de l'augmentation des distances au drive, à partir des années 1990. © Jared C. Tilton / Getty Images - AFP

L’aspect le plus spectaculaire du jeu de golf dans les yeux de celles et ceux qui ne le connaissent pas (encore) est sans doute de voir cette petite balle blanche recevoir une belle claque, son à l’appui, puis prendre son envol sur fond de ciel avant d’atterrir. Parfois loin. Parfois très loin. D’accord… mais à quelle distance précisément ? Et puis, les meilleur(e)s du monde, au jeu de golf, est-ce que ce sont ceux qui tapent le plus fort et le plus loin ?

Prenons dans l’ordre, et parlons tout d’abord matériel. Dans le sac de golf, autorisé à contenir 14 clubs au maximum si l’on veut jouer selon les règles, tous ne servent pas à expédier la balle le plus loin possible, loin de là. La majeure partie d’entre eux sont d’ailleurs là pour permettre de couvrir une distance précise, pour atteindre une cible où qu'elle se trouve.

Ordres de grandeur et piste d'aéroport

Un club, cependant, fait particulièrement exception à cette règle : le driver. Avec sa tête en forme de demi-lune, il fait partie de la famille dite des bois, qui porte ce nom car, jusqu’au tournant des années 1990 à peu près, ses clubs avaient des têtes fabriquées en bois. Dans cette famille (et parmi tous les clubs en général), le driver est l’outil conçu pour aller le plus loin possible. De fait, il est quasi exclusivement utilisé sur les départs, avec pour objectif de faire un maximum de distance, sans toutefois trop s’écarter du chemin idéal. De manière logique, le coup réalisé avec ce club se nomme un drive.

Parlons maintenant ordres de grandeur. Une balle de golf, pour peu qu’elle soit tapée avec du matériel légal et dans des conditions ordinaires d’un parcours de golf, ira rarement plus loin que 350 m environ. Même si certains ont fait une discipline à part entière d’essayer de repousser cette limite (lire plus loin). Si quelqu’un vous parle d’une distance plus grande, c’est soit que les conditions étaient volontairement choisies pour que la balle voyage loin (du genre taper dans l’alignement d’une piste d’aéroport pour que la balle roule sur le bitume), soit qu’il exagère très franchement.

Si l’on doit essayer de déterminer une distance moyenne dans la population générale des golfeurs, disons que si vous avez un cousin issu de germain au troisième degré qui joue au golf, qui se situe dans la vingtaine d’années et qui a un bon niveau, il est assez probable qu’il soit capable de taper des coups d’environ 250 m. Si c’est une cousine, cette distance se situe vraisemblablement vers les 215 m.

Mais tout cela cache non seulement de grandes disparités parmi les profils (il y a les petits et les gros frappeurs), mais aussi une grande sensibilité aux conditions. Prenez un joueur tapant des drives à 250 m en moyenne, donnez-lui un bon vent de face de 30 km/h, un terrain très souple qui empêchera la balle de rouler, le tout par 5° C, et il sera déjà bien content de franchir la barre des 200 m. À l’inverse, avec de l’air favorable et chaud et un terrain dur comme du béton, il s’approchera des 300 m sans grande peine. Tout cela sans aborder la question du possible dénivelé du terrain, qui a évidemment son rôle à jouer.

Mais alors, le haut du panier de la planète golf, il tape à combien ? Il est possible de le savoir, car les plus grands circuits professionnels placent des radars sur les parcours, afin de mesurer tout cela. Chez les hommes, le plus grand circuit professionnel du monde se nomme le PGA Tour. Et sur ce dernier, jusqu’à présent en 2025, la moyenne de distance au drive s’établit à 268,8 m. Chez les dames, le circuit de référence se nomme le LPGA Tour, où la distance moyenne au drive s’établit à 234 m environ. À noter, pour être précis, que les deux circuits utilisent des méthodes un peu différentes pour prendre leurs mesures.

Là, vous vous dites forcément : « Attendez, mon cousin issu de germain au troisième degré, avec ses 250 m au drive, il est si proche que ça du niveau de golf des meilleurs ? ». Réponse : probablement pas. Il en est même, vraisemblablement, très loin. Tout d’abord parce que les joueurs du PGA Tour ne tapent pas chaque drive de toutes leurs forces. Cela expédierait leur balle dans le décor trop souvent, et par ailleurs, sur certains trous, les obstacles obligent à se contenter d’une distance plus courte. Ensuite, il faut bien comprendre que le fait d’être bon au jeu de golf dépend d’une foultitude de paramètres, la distance n’étant qu’un seul d’entre eux.

Illustration avec le plus long frappeur sur le PGA Tour, toujours en 2025, le Sud-Africain Aldrich Potgieter. Il drive en moyenne à 285 m, presque 20 m au-dessus de la moyenne. Et malgré cela, il n’est « que » 66e joueur mondial. Chez les Dames, la plus grosse frappeuse du LPGA Tour en 2025 est l’Espagnole Julia Lopez Ramirez, avec 260 m. Elle est 107e au classement mondial. En quelques sortes, cela se rapproche du tennis, où les joueurs qui ont la plus grosse vitesse de balle au service ne sont pas forcément les meilleurs du monde.

Toutefois, il faut bien noter que ces distances ont substantiellement augmenté au cours du dernier demi-siècle. Cela, tout simplement, en raison des progrès du matériel et des méthodes de préparation physique. En 1980, la moyenne de la longueur des drives sur le PGA Tour était d’environ 234 m. Elle est plus de 30 m plus haute aujourd’hui. En cela, Tiger Woods a été le joueur le plus influent, lors de son explosion à la fin des années 1990. Les meilleurs joueurs mondiaux de l’époque se souviennent tous d’avoir vu leur balle reposer une quarantaine de mètres derrière celle du Tigre après un drive.

On l’a dit, les joueurs et joueuses professionnels, même si tous travaillent le secteur du driving et de la puissance, n’essaient pas de battre leur record à chaque drive. Mais il existe une discipline où « se déchausser », comme cela s’appelle dans le jargon du golf, est le but premier. Cela porte le nom très évocateur de long drive. Né de manière ludique dans les années 1970, ce sport s’est développé indépendamment des instances du golf, et fait concourir des athlètes qui, la plupart du temps, se préparent spécifiquement pour taper le plus loin possible. Et tant pis si le reste de leur jeu de golf en pâtit.

Forcément, cela affole le compteur. En 2022, l’Allemand Martin Borgmeier est devenu champion du monde de long drive en satellisant sa balle à 389 m (voir vidéo ci-dessus). Chez les Dames, en 2024, la Néo-Zélandaise Phillis Meti s’est imposée avec 283 m. Guinness World Record a forcément eu son mot à dire sur la question, et établit le record du monde à 470 m. Mais par exemple, en octobre 2023, l’Américain Kyle Berkshire, plein vent avec et au huitième essai, a atteint 530 m.

Des nombres fous, mais comme dit précédemment, si le niveau de golf était proportionnel aux nombres de mètres parcourus, cela se saurait depuis bien longtemps. Car si vous ne connaissez pas encore le golf, dites-vous bien une chose : un drive de 300 m et un coup de 10 cm pour faire tomber la balle dans le trou comptent tous les deux pour un coup.