Très vite après sa naissance en 1959, le golf de Saint-Nom-la-Bretèche a pris la bonne habitude de recevoir les plus grandes compétitions professionnelles. Alors qu'il accueille cette semaine son quatrième Open de France, coup de projecteur sur six décennies d'amour jamais démenti.

En 1963, Saint-Nom reçoit la Canada Cup, coupe du monde par équipes de golf. © Collection Philippe Palli

C'est en 1954 que le promoteur immobilier Daniel Féau fait l'acquisition d'une ancienne ferme du XVIIIe siècle et des terrains agricoles attenants situés dans le petit village de Saint-Nom-la-Bretèche, à flanc de coteau entre le plateau de la forêt de Marly et la plaine de Versailles, à 25 kilomètres à l'ouest de Paris. Il y bâtit peu à peu le rêve d'une vie, celui d'un country club select offrant à ses membres la possibilité de s'adonner non seulement aux joies du golf, mais aussi à celles d'autres activités sportives et sociales.

La conception des parcours est confiée à l'architecte britannique Fred Hawtree et à son compatriote paysagiste Russell Page, qui réalisent le Bleu en 1959 et le Rouge l'année suivante, transformant ainsi le paysage environnant en un magnifique jardin golfique arboré. C'est pour faire honneur à cet écrin et développer sa réputation que le club décide d'accueillir de grandes compétitions internationales.

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Le golf a ouvert en 1959. © Golf de Saint-Nom-la-Bretèche

1963 : Le gotha à la Canada Cup

Pour un coup d'essai, c'est un coup de maître : Saint-Nom organise, quatre ans après son ouverture, la Canada Cup, véritable coupe du monde de golf par équipes – qui prendra d'ailleurs officiellement ce nom à partir de 1967. Pour l'occasion, le gotha se rue dans l'Ouest parisien : non seulement les plus grands champions de l'époque, parmi lesquels Arnold Palmer, Jack Nicklaus, Gary Player, Roberto de Vincenzo et Bob Charles, mais aussi des célébrités telles que le duc de Windsor, ancien roi George VIII du Royaume-Uni, et Richard Nixon, ex-vice président et futur président des États-Unis.

La compétition, bien que jouée sur un parcours Bleu jugé facile par la presse spécialisée de l'époque, tient toutes ses promesses : les Américains remportent leur sixième Canada Cup en onze éditions, et le jeune Nicklaus, déjà vainqueur du Masters et du PGA Championship cette année-là, s'adjuge les honneurs du classement individuel. Surtout, malgré une météo peu clémente en cette fin du mois d'octobre, la foule est nombreuse ; et pour la première fois en France des caméras de télévision sont là pour capter des images de la petite balle blanche !

Gary Player, Arnold Palmer, le duc de Windsor et Jack Nicklaus sont parmi les vedettes de la Canada Cup 1963. © Collection Philippe Palli

1965 : Sota s'envole à Open de France

Ramón Sota, qui fut par la suite connu pour être l'oncle de Severiano Ballesteros, était avant tout un golfeur de premier plan dans les années 50 et 60, amassant les victoires aux quatre coins de l'Europe avant la création formelle du PGA European Tour en 1972. En juillet 1965, alors que Saint-Nom reçoit pour la première fois l'Open de France, l'Espagnol alors âgé de 27 ans remporte l'un de ses plus éclatants succès, martyrisant le parcours Bleu configuré en par 73.

Vainqueur à -24 avec un coup d'avance sur le Sud-Africain Cobie Legrange et quatre sur l'Australien Peter Thomson, il entre dans la légende en rendant lors du deuxième tour une énorme carte de 62 (-11), auréolée d'un sensationnel albatros sur le trou n° 5 (par 5 de 508 mètres) après un coup de bois 4 tapé en aveugle, alors que la partie précédente était encore sur le green !

Ramón Sota, auteur d'un sensationnel albatros lors du deuxième tour. © Collection Philippe Palli

1969 : Le jour de gloire de Garaïalde

Depuis le début des années 50, Jean Garaïalde gagne sa vie en jouant au golf, et alors qu'il approche de son 36e anniversaire en ce 17 juillet 1969, il est depuis longtemps le meilleur professionnel français. Cette année-là, il a déjà remporté l'open d'Espagne, et prolonge son état de grâce lors de l'Open de France disputé pour la deuxième fois à Saint-Nom-la-Bretèche.

Face à lui se dresse le grand champion argentin Roberto de Vincenzo, triple vainqueur de l'épreuve et lauréat du British Open deux ans plus tôt. Grâce à deux birdies sur les deux derniers trous, Garaïalde rejoint la star en tête, forçant un play-off en mort subite. Après deux premiers trous partagés, l'Argentin part à la faute au troisième, laissant à son adversaire un putt d'un bon mètre pour le titre. « J'ai sauté de joie sur le green », racontera par la suite le Basque bondissant, premier Tricolore à s'imposer dans son open national depuis la victoire de Firmin Cavalo en 1948.

« J’ai sauté de joie sur le green ! » avoua le Basque bondissant. CQFD ! © Collection Philippe Palli

1970 : Les vedettes mises au parfum

En 1970, Gaëtan Mourgue d'Algue, membre fondateur du club et créateur du magazine Golf Européen, et son associé Dominique Motte, organisent à Saint-Nom-la-Bretèche le Tournoi des champions. Au vainqueur est promis le trophée Lancôme, mis en jeu par la célèbre marque de cosmétiques dont le président Pierre Menet est séduit par le potentiel commercial d'un tournoi de golf professionnel.

Disputé sur trois tours du 16 au 18 octobre, l'événement bien que non officiel réunit huit vedettes : l'Américain Arnold Palmer, qui deviendra un fidèle du tournoi et contribuera largement à développer sa réputation internationale, son compatriote Raymond Floyd, le Sud-Africain Gary Player, le Néo-Zélandais Bob Charles, l'Espagnol Ramón Sota, l'Italien Roberto Bernardini, notre Jean Garaïalde national et l'Anglais Tony Jacklin. C'est ce dernier, dans la foulée de son succès historique à l'U.S. Open, qui inscrit le premier son nom au palmarès d'un tournoi qui deviendra mythique et attirera constamment les plus grands, jusqu'à sa disparition en 2003 suite au retrait de son sponsor.

Les affiches du premier et du dernier Trophée Lancôme, en 1970 et 2003. © D. R.

Le palmarès du trophée Lancôme

1970 : Tony Jacklin (ENG)
1971 : Arnold Palmer (USA)
1972 : Tommy Aaron (USA)
1973 : Johnny Miller (USA)
1974 : Billy Casper (USA)
1975 : Gary Player (RSA)
1976 : Seve Ballesteros (ESP)
1977 : Graham Marsh (AUS)
1978 : Lee Trevino (USA)
1979 : Johnny Miller (USA)
1980 : Lee Trevino (USA)
1981 : David Graham (AUS)
1982 : David Graham (AUS)
1983 : Seve Ballesteros (ESP)
1984 : Sandy Lyle (SCO)
1985 : Nick Price (ZIM)
1986 : Seve Ballesteros (ESP) & Bernhard Langer (GER)
1987 : Ian Woosnam (WAL)
1988 : Seve Ballesteros (ESP)
1989 : Eduardo Romero (ARG)
1990 : José María Olazábal (ESP)
1991 : Frank Nobilo (NZL)
1992 : Mark Roe (ENG)
1993 : Ian Woosnam (WAL)
1994 : Vijay Singh (FIJ)
1995 : Colin Montgomerie (SCO)
1996 : Jesper Parnevik (SWE)
1997 : Mark O'Meara (USA)
1998 : Miguel Ángel Jiménez (ESP)
1999 : Pierre Fulke (SWE)
2000 : Retief Goosen (RSA)
2001 : Sergio García (ESP)
2002 : Alex Čejka (GER)
2003 : Retief Goosen (RSA)

1982 : Seve, l'enfant chéri de Saint-Nom

Nul autre joueur n'est aussi intimement lié à l'histoire de Saint-Nom-la-Bretèche que Severiano Ballesteros. Le prodige espagnol, invité au Trophée Lancôme pour la première fois en 1976, remporte l'épreuve à quatre reprises : cette année-là, à l'âge de 19 ans, face à la légende Arnold Palmer ; en 1983 devant Corey Pavin ; en 1986 lorsque, après quatre trous de play-off partagés avec Bernhard Langer et la tombée de la nuit, il soulève le trophée avec l'Allemand ; et enfin en 1988 quand il devance de quatre coups son jeune compatriote José María Olazábal

Entre-temps, l'année 1982 est marquée par une autre victoire dans son jardin de l'Ouest parisien, lors de l'Open de France que le club reçoit pour la troisième fois. Lors du dernier tour, Seve rend une carte de 65 (-7) pour surclasser de quatre coups l'Écossais Sandy Lyle, tenant du titre. C'est le deuxième de ses quatre succès à l'Open de France, après celui de 1977 au Touquet et ceux de 1985 à Saint-Germain et de 1986 à La Boulie.

2009 : Un petit air de Ryder Cup

Héros européen de la Ryder Cup, d'abord comme joueur puis comme capitaine lors de l'édition de 1997 à Valderrama, en Espagne, Severiano Ballesteros a créé en 2000 une épreuve qui porte son nom, le Seve Trophy, afin de permettre aux Européens de s'affronter par équipes et en match play lors des années sans Ryder Cup. Après cinq éditions disputées dans les îles britanniques et en Espagne, il installe l'épreuve à Saint-Nom-la-Bretèche en 2009, puis à nouveau en 2011 et en 2013.

Durant trois éditions successives, les fairways du parcours Composite voient défiler l'élite européenne de l'époque, dont Rory McIlroy, Henrik Stenson, Francesco Molinari, Graeme McDowell, Ian Poulter, Lee Westwood, Thomas Bjørn ou encore Darren Clarke. Cette semaine, douze ans après leur dernière venue à Saint-Nom, les meilleurs pros du monde sont enfin de retour !

Seve lors du Trophée Lancôme en 1988. © Jacques Loew / Photo12 - AFP