Quatorze fois victorieuse sur le Ladies European Tour (LET) entre 2006 et 2015, la Française, aujourd’hui entraîneur national, revient sur son « épopée » où elle décrocha le titre de n°1 européenne après avoir gagné cinq fois en six mois !

Gwladys Nocera, quelques secondes après son triomphe au Göteborg Masters © BJORN LARSSON ROSVALL / SCAMPIX - AFP

Le 4 mai 2008, il y a tout juste douze ans, Gwladys Nocera remportait le Ladies Scottish Open avec un score total de 208 (-5). Soit deux coups devant la Suédoise Maria Boden. Sans le savoir encore, la Française écrivait les premières lignes d’un des plus beaux chapitres de l’histoire du golf féminin tricolore sur le Ladies European Tour (LET). 

Finir tout en haut de l’ordre du mérite

Passée sur le « tard » professionnelle à l’âge de 27 ans en novembre 2002 après avoir suivi des études de commerce international aux Etats-Unis, la native de Moulins (Allier) décroche son premier succès en 2006, au Swiss Ladies Open. Deux victoires s’enchaînent rapidement avant d’en ajouter deux autres à son palmarès en 2007, devenant de facto l’une des valeurs sûres européennes avec deux participations successives aux Solheim Cup 2005 et 2007. Mais la saison 2008 sur le LET va la placer tout en haut de la pyramide. 

« J’avais annoncé haut et fort que je voulais gagner l’Ordre du mérite, se souvient l’actuel entraîneur national de l’équipe de France girls (-18 ans). En France, c’est assez dur de dévoiler aux médias des objectifs élevés. On sait que le retour peut être compliqué si on ne les atteints pas. J’avais pris ce risque même si ça faisait deux-trois ans que je tournais autour du pot. Je savais aussi que j’en étais capable. Déclarer quelque chose d’aussi important et le réaliser, c’est assez fort finalement. Je pense souvent aux champions olympiques qui travaillent quatre ans pour y arriver, c’est une satisfaction énorme. » 

Un seul cut manqué en 23 tournois

Le 8 juin, au Dutch Ladies Open, elle devance d’une petite longueur l’Anglaise Melissa Reid, avec un score total de 203 (-13). Mais sa principale adversaire, la Suédoise Helen Alfredsson l’emporte en juillet à l’Evian Masters, un tournoi à très forte dotation. Nocera, elle, ne parvient pas à franchir le cut… Le seul accroc en 23 tournois joués cette année-là.

« Helen m’a passé devant à l’ordre du mérite, poursuit-elle. Il fallait que je gagne d’autres tournois pour inverser la tendance. En août, je remporte le SAS Ladies Masters (-13 avec trois points d’avance sur l’Espagnole Tania Elosegui et l’Anglaise Samantha Head). Et puis arrive le Göteborg Masters, à la mi-septembre. Helen avait dessiné le parcours. Je l’ai fracassé en l’emportant à -29 (259) ! » 

Un -29 historique

Irrésistible avec notamment un deuxième tour signé en 62 (-10) sans erreur, elle laisse sa première poursuivante (la Suédoise Nina Reis) à onze coups derrière. Une véritable démonstration de force (deux eagles, vingt-neuf birdies, quatre bogeys en 72 trous) qui se solde par le score le plus bas jamais réalisé dans l’histoire du tour européen féminin. Un record qui tient toujours…

« C’était assez incroyable, confirme-t-elle. Mais rien n’était encore joué. Arrive alors le Madrid Ladies Masters, début octobre. Une grosse dotation. Je savais qu’en gagnant ce tournoi, je repassais devant Helen. Je savais aussi qu’elle ne revenait plus en Europe. Bref, grosse pression sur mes épaules. Mais au fond de moi, je devais savoir que ça allait bien se passer. Ce fut pourtant un peu compliqué au début. Cela faisait plusieurs semaines que l’on marquait notre balle. Au trou n°3, le premier jour, un par 5 que l’on pouvait toucher en deux, j’envoie un gros coup de drive. En arrivant sur ma balle, impatiente, je la marque et je la relève. Là, je croise le regard de mon caddie et je comprends que j’ai fait une bêtise. On ne marquait pas sa balle cette semaine-là. J’ai donc pris un point de pénalité. Au trou d’après, j’étais à l’adresse, putter en mains sur le green. Je puttais pour le par sur un par 4. Malencontreusement, j’ai touché ma balle. Nouveau point de pénalité. J’ai fait double avec le point de pénalité. Heureusement, je me suis par la suite mis dans la partie et j’ai très bien joué à l’arrivée. Je me souviens du 17 (par 3 en dévers énorme avec du vent), la balle est restée un temps indéterminé en l’air avant de retomber là où je le voulais. » 

Quand le LET vivait très bien…

Elle gagne pour la cinquième fois en six mois avec un score de 208 (-11), quatre coups devant l’Espagnole Paula Marti. Plus rien ne pourra l’empêcher de devenir n°1 européenne.
« Le plus marquant pour moi, c’est que ces résultats n’ont pas été engrangés sur un ou deux mois. Ce fut étalé sur toute la saison. Je jouais vraiment bien. En 2008, j’étais dans une progression ascendante. Mais en même temps, je n’ai jamais ressenti que j’étais intouchable. J’étais centrée sur moi, sur le process et pas sur le résultat. Cela ne pouvait que bien se passer. Je m’entraînais beaucoup, je travaillais beaucoup, j’avais une super hygiène de vie… Physiquement, j’étais au taquet. Tout était réuni pendant plus d’un an. C’était une belle époque. Le LET fonctionnait très bien. L’ambiance était super, on passait pas mal de temps ensemble, on visitait les villes…On avait plein de tournois au calendrier. Les Américaines venaient souvent en Europe pour les points de la Solheim Cup. Les tournois en Australie étaient prisés, les meilleures étaient là. Ce n’était pas le même Tour qu’aujourd’hui. Jouer en Europe toute l’année, en jouant bien, on s’en sortait financièrement. On jouait toutes les semaines. Les étés, il y avait la tournée scandinave durant un mois, un mois et demi. L’hiver, c’était l’Australie, l’Afrique du Sud pendant deux mois. On n’arrêtait pas. » 

2008, année folle ? Sans aucun doute. Et pourtant, Gwladys Nocera est aussi fière de cette période faste que de sa « renaissance » opérée en 2013 après quatre ans sans aucune victoire et un passage aux Etats-Unis (entre 2010 et 2011) pour le moins contrasté.
« On dit souvent que c’est plus difficile de revenir au top que d’être au top, conclut-elle. Le plus important dans ma carrière aura peut-être été aussi le fait d’être revenue au sommet après avoir été au fond du seau. Certes, je n’ai pas gagné autant de tournois (quatre entre 2013 et 2015), mais j’ai, de nouveau, très bien joué au golf. Ce fut une énorme satisfaction pour moi. »