En conférence de presse à la veille de prendre le départ du FedEx Open de France, Matthieu Pavon est revenu sur son retour avec son ancien coach Jamie Gough et son espoir de retrouver prochainement son meilleur jeu. Sans chercher à occulter sa saison 2025, plutôt décevante sur le plan sportif.

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Matthieu Pavon, en conférence de presse, ce mercredi à Saint-Nom-la-Bretèche. © Lucas Hélin / ffgolf

Dans quel état d’esprit arrivez-vous cette semaine au FedEx Open de France ?
Dans un très bon état d'esprit. J'ai repris l'entraînement avec mon ancien coach, Jamie Gough. On se remet à travailler tous les deux, on a cette complicité, qui revient immédiatement, donc c’est excitant. Ça fait dix jours qu'on travaille dur, et les sensations sont de mieux en mieux. J'ai très bien joué ce matin au pro-am, ça me fait beaucoup de bien et je suis très content d'être là.

Avez-vous déjà joué à Saint-Nom-la-Bretèche en compétition ?
Non, jamais en compétition. J'ai joué une seule fois 18 trous, mais je ne pourrais même pas me rappeler sur lequel des deux parcours, ça fait un petit moment.

Du coup, vous n’avez pas de repères négatifs, comme vous pouvez en avoir au Golf National ?
C'est sûr que quand on joue un golf difficile comme le Golf National, on crée presque des peurs, des traumatismes sur certains coups qu'on a pu manquer auparavant. On se souvient des bons mais aussi des moins bons. Donc là, c'est une page blanche. C'est génial de découvrir un beau parcours, surtout qu'il est dans un état merveilleux. Donc tout est réuni pour faire un super FedEx Open de France.

Cela fait un an que vous n’avez pas joué en compétition en France. Cela vous fait du bien de revoir des visages connus, et d’entendre parler français ?
Oui, aux États-Unis, ce qui manque beaucoup, c'est d'entendre notre langue. On a tout le temps de l'anglais partout. Jouer autour de mes amis, de mes proches et aussi des fans français, c'est une opportunité exceptionnelle.

Durant l’année que vous venez de passer aux États-Unis, vous avez eu l’occasion de bien vous installer là-bas ?
Oui, je suis bien installé maintenant, tout se cale. On commence à avoir des automatismes, on rencontre du monde, j’ai un enfant qui va à l'école, je suis membre dans des golfs, j’ai une maison… On commence à avoir des routines qui s'installent et ça fait du bien, parce que l'année dernière, c’était un peu « où est ce qu'on va la semaine prochaine ? ». Cette année n'a pas été forcément très positive au niveau golf, mais sur le plan personnel, on peut en sortir avec du positif.

Adrien Saddier et Martin Couvra font une très belle saison sur le DP World Tour, vous les attendez sur le PGA Tour ?
Bien sûr, je suis très content pour eux. Il y a encore quelques années, on a beaucoup critiqué le golf français, en disant qu’il n'avait pas de vrais champions. On n'avait pas de joueurs sur le PGA Tour, pas de vainqueur de Majeur. Quatre ou cinq ans plus tard, on a un vainqueur sur le PGA Tour, des victoires sur le DP World Tour tous les ans, l’année prochaine on sera possiblement quatre, voire cinq Français sur le PGA Tour. Donc je suis très fier de mes amis et compatriotes qui font des très bonnes saisons. Même depuis les États-Unis, je les suis régulièrement et je suis là pour les encourager. Ça serait génial de pouvoir se retrouver l’année prochaine sur le même circuit.

Martin Couvra est actuellement en position de rejoindre le PGA Tour, mais ce n’est pas encore acquis. Vous avez connu cette situation il y a deux ans. Comment on arrive à gérer sans se projeter, en s’extrayant de la pression de cet objectif ?
C'est très dur. J'ai fait des erreurs, moi, cette année, par exemple par rapport à la Ryder Cup, qui me tenait très à cœur. Il faut essayer de baisser son niveau d'exigence au maximum, de suivre son process, d'avoir un plan d'entraînement, un plan de jeu, jouer coup après coup, jour après jour, et puis laisser venir progressivement. C'est dur de pas se projeter, parce qu'on a envie. Après moi, quand je suis monté sur le PGA Tour, ce n’était pas mon objectif de l'année, je sentais mon jeu pas encore à la hauteur. Et finalement, j'ai gagné à Madrid, j'ai pris confiance, et ça s'est très bien enchaîné. Martin est dans une position un peu différente. Je pense que la meilleure chose qu’il puisse faire, c'est continuer à faire ce qu'il fait très bien depuis maintenant neuf mois. Se concentrer sur ses objectifs de performance, sur son jeu, et puis de rester patient, parce que peu importe où on est, on sait qu'après une très bonne semaine, on rebat les cartes.

J'ai vraiment fait un très bon pro-am, j'étais très content des trajectoires, de la frappe, et ça faisait un petit moment que je ne m’étais pas senti avec autant de liberté dans mon jeu.

Matthieu Pavon

En juillet, après The Open, vous avez mis fin à votre collaboration d'un an avec Mark Blackburn, pour retourner avec votre coach précédent, Jamie Gough. Comment ce dernier juge-t-il votre travail technique depuis un an ? Êtes-vous reparti de votre ancien swing, ou avez-vous intégré des changements effectués avec Mark Blackburn ? 
Il y avait plusieurs choses. J'avais un club qui traînait un peu plus derrière moi. C’est pour ça que cette saison, j’ai manqué beaucoup plus de coups à gauche. Jamie a tout de suite cerné les priorités. On est revenu sur des basiques beaucoup plus neutres. J'avais un grip de main gauche qui devenait plus fort, j’avais les mains pas mal en avant. Il y avait des petites choses qui ne me plaisaient pas forcément dans la mise en place, donc on a rééquilibré ça. On retrouve des sensations qui sont familières, des trajectoires de balles aussi qui sont familières, des manqués qui sont familiers. C'était un peu ça l'année dernière. Cette année, il y avait des incompréhensions sur certains coups que je tapais, je ne comprenais pas pourquoi je manquais à certains endroits. Donc on rééquilibre gentiment la balance. Après, ce qui est bien, et je pense qui est très intéressant avec Jamie, c'est qu'on n’a pas tout mis à la poubelle de ce qu'on a vu avec Mark. Il y a des choses qu'on a apprises, des choses qui nous sont utiles pour corriger les erreurs qu'on avait faites et qui ne me plaisaient pas quand j'ai décidé de faire le changement entre Jamie et Mark. Après, c'est sûr qu'il va falloir encore pas mal de travail, parce que ça ne se fait pas en une ou deux semaines. Mais comme je le disais, ce matin, j'ai vraiment fait un très bon pro-am, j'étais très content des trajectoires, de la frappe, et ça faisait un petit moment que je ne m’étais pas senti avec autant de liberté dans mon jeu.

Est-ce que, un an après, vous regrettez ce changement ?
Ce n’est pas le changement que je regrette, c'est ce qui m'a amené à changer. Je pense que j'aurais pu gérer des choses différemment avec Jamie dans notre dialogue, sur ce que je voulais et ce que lui voulait, dans l'échange avec mon équipe aussi, je pense que j'aurais pu mieux gérer ces choses-là qui m'auraient amené à prendre peut-être une décision un peu différente. Après, il y a aussi ce fameux luxe d'avoir la carte du PGA Tour de garantie (il est actuellement exempté jusqu'à fin 2026, NDLR). Donc pour moi, c'était maintenant ou jamais pour avoir une autre expertise, qui pouvait m'apporter quelque chose de plus. À ce moment-là, j'étais dans le top 25 mondial, et j'essaie toujours d'aller plus haut. Je sentais des faiblesses dans certains compartiments que je voulais vraiment aller gratter pour devenir meilleur. C'était l'année parfaite pour essayer. Malheureusement, ce n’est pas facile, mais il y a plein de choses que je vais utiliser encore aujourd'hui qui viennent de l'enseignement de Mark, et je trouve ça intéressant.

Au mois d’août, après le dernier tournoi régulier du PGA Tour, vous êtes rentré en France, vous avez joué quelques parties de golf entre copains, vous avez pu décompresser. Cette pause est venue au bon moment ?
Oui, c'est tombé au bon moment. Après, c'est moi et mon pseudo-professionnalisme (sic) qui font que je n’ai pas vraiment profité de ces moments plus tôt dans la saison, quand j'en avais besoin. J'étais un peu une cocotte-minute qui encaissait, jusqu’au moment où j'ai décidé de prendre cette vraie longue pause. Je pense qu'avec du recul, si j'avais fait un petit temps d'arrêt au milieu de ma saison, ça m'aurait été bénéfique pour cette année. Mais encore une fois, on apprend de ses erreurs, et c'est ça la beauté de notre sport. Mais oui, ça m'a fait du bien. Je pense que je m’écouterai plus à l'avenir. J'adore jouer, j'adore m'entraîner. Il y a tellement de beaux tournois sur le PGA Tour, je m'entraîne tous les jours dans de magnifiques infrastructures. Parfois il faut juste savoir dire stop, et prendre du temps pour soi.

Prendre du temps pour vous, cela va-t-il justement faire partie de votre programme jusqu’à janvier ?
L'automne va s'organiser entre des tournois et des périodes assez longues de travail et de repos. Le but du jeu, pour moi, c'est d'arriver le plus en forme possible pour l'année prochaine. Ce qui se passe en fin d'année, ça ne sera que du bonus. Je le prends vraiment comme de la préparation à l'année prochaine. Si on joue bien, ça sera génial, et si on joue moins bien, on ajustera pour le tournoi d’après. Le but du jeu étant d'être prêt au Sony Open, en janvier.

Dans votre carrière, vous avez déjà connu des moments où il fallait faire le dos rond en attendant que les résultats arrivent. C’est une expérience qui vous sert actuellement ?
C’est dur, on ne va pas se le cacher, ce n’est pas quelque chose qu’on vit avec le sourire (il a prononcé cette phrase en souriant, NDLR). Car encore une fois, je suis un compétiteur, et je n'aime pas perdre toutes les semaines, me faire battre. Je n'aime pas produire du mauvais jeu, que ce soit pour moi ou pour les gens qui me supportent. Ça me tient aussi beaucoup à cœur de partager mon plaisir sur le parcours avec tout le monde. Donc ce n’est pas plaisant. Mais j'ai eu des périodes dans ma carrière où je me souviens d’être au téléphone avec ma femme, en pleurs, à dire que je pensais qu’au fond de moi, malgré tous les efforts que je produisais, je ne deviendrais jamais un champion. C'était dur pour moi, mais bon, au final, j'ai fait le dos rond. On y va comme si on sortait de l'hôpital, un pas après l'autre. Et puis chaque jour devient meilleur, et on recommence à avoir un ou deux bons tournois, et tout de suite, on se lance dans une nouvelle dynamique. Et j’ai gardé cet état d'esprit : toujours continuer de travailler, avancer. Ça, ça m'a permis d'atteindre pas mal de mes rêves.

Je pense très honnêtement que l'Europe a toutes ses chances cette année.

Matthieu Pavon, à propos de la Ryder Cup de la semaine prochaine.

La semaine prochaine, il y a la Ryder Cup. En début d’année, vous faisiez partie des joueurs pressentis pour être dans l’équipe européenne. À quel moment avez-vous senti que, finalement, elle se jouerait sans vous ?
Assez tard, parce qu'on n'est pas à l'abri de rentrer en Europe et de gagner un Open d’Écosse ou de faire un bon résultat à The Open, puis d’avoir l’Irlande et Crans-Montana pour rentrer dans l’équipe. Ça se joue plutôt sur les cinq derniers tournois. Ce qu'il fallait, je pense, c’était être en forme au bon moment. On sait que Luke Donald est très regardant sur la forme du joueur. Si la sélection s'était faite après Wentworth, est-ce qu’Alex Noren aurait été dans l’équipe ? Moi je dis que peut-être, oui. Donc lors des cinq derniers tournois, je pense que c'est là où j'ai senti que c'était vraiment terminé.

Comment allez-vous la suivre cette Ryder Cup ? Comment sentez-vous les choses entre Europe et États-Unis ?
Je veux la suivre pleinement. Que ce soit tous les Majeurs ou la Ryder Cup, je passe mes journées devant la télé à les regarder. Je n'ai pas envie de manquer un seul coup, du chip qui rentre à la ficelle exceptionnelle. C'est vrai que New-York n'était pas si loin de la maison, j'aurais pu aller me glisser pour voir un peu l'ambiance, mais je reste toujours dans la même optique que pour le Masters : j'avais eu l'occasion d'y aller plusieurs fois, et je n'y étais jamais allé, parce que je voulais y aller en tant que joueur, et là c'est la même chose. Je pense très honnêtement que l'Europe a toutes ses chances cette année. Ce n'est pas chauvin, mais je vois bien l'Europe s'imposer à Bethpage. C’est une belle bande de copains. L'équipe américaine est pleine d'individualités, mais je pense que sur des compétitions comme ça, l'esprit d'équipe a une vraie part à jouer.