Il a été le troisième mousquetaire, sur les désormais cinq Français engagés, qualifié pour le 123e U.S. Open. À Los Angeles, Paul Barjon profite du rêve d’un 3e Majeur disputé loin de la réalité du Korn Ferry Tour.

« Tu vois le petit point là-bas à 265 mètres ? C'est le drapeau du 11, un par 3. » © Grant Halverson / Getty Images North America - AFP

C’est un changement radical. Paul Barjon quitte le temps d’une semaine la vie du Korn Ferry Tour, sur lequel il (ré)évolue depuis cette année, pour côtoyer les très grands noms de son sport sur le tracé du Los Angeles Country Club. Là-bas, pour le 123e U.S. Open, il retrouve quatre compatriotes qui font de leur groupe de Frenchies, le plus fourni dans l’histoire de l'open national américain. Pourtant, entre l’importance de l’enjeu et la qualité du plateau, les moments de partage se feront rares. « Au final, c’est une semaine où l’on passe beaucoup de temps avec nos entourages respectifs, amorce le Français qui joue là son 3e U.S. Open après ceux de 2020 et 2021. Certains ont leur coach, d’autres leur famille. Et de toute façon, l’ambiance en Majeur et sur le PGA Tour est moins conviviale, c’est très professionnel. » Depuis sa rétrogradation en deuxième division, le Néo-Calédonien a fait le constat : « C’est moins "copain-copain" que le circuit européen ou le Korn Ferry. Il y a quelques nouveaux joueurs du circuit qui restent seuls toute l’année, qui déjeunent seuls, parce qu’ils ne connaissent pas grand-monde, ce n’est pas toujours drôle. Et le reste est composé à 90 % d’Américains et quelques Européens qui sont pour la plupart ceux qui jouent en Ryder Cup, donc ils volent en avion privé et font tout de cette façon. »

D’un autre côté, celui qui vit au Texas depuis la fin de son cursus universitaire en 2016 se réjouit de retrouver cette semaine quelques-uns de ses anciens acolytes des échelons inférieurs, à l’instar du Canadien Taylor Pendrith qu’il a connu lors de son passage sur le PGA Tour Canada. L’occasion de se remémorer les habitudes de vie d’un circuit qui pousse parfois à faire 3 h 30 de route d’un événement à un autre, comme la semaine passée au BMW Pro-Am, ou de raconter sa rencontre avec un médaillé olympique de curling lors de ce même tournoi.

Côté sportif, la performance a manqué lors des deux derniers tours de l’étape. « C’était la quatrième semaine de jeu consécutive et les deux premiers tours étaient sous forme de pro-am, ce qui a donné des parties de six heures, donc j’étais un peu à court le week-end », précise-t-il. À cela s’ajoutait une qualification à l’U.S. Open le lundi de la même semaine, de laquelle il a tiré son ticket pour Los Angeles. « Je n’étais pas sûr de jouer le tournoi. Je m’étais dit que si je me qualifiais, je rentrais à la maison me reposer. Mais le jeu n’était pas trop mal et la priorité de l’année est de marquer des points sur le Korn Ferry, donc je me suis rendu en Caroline du Nord. » Classé 130e du ranking après six mois de saison, le Bordelais de naissance vise une remontée et, à défaut, la conservation de son droit de jeu. Une bonne performance à l’U.S. Open serait une aubaine, mais la quête du moment présent l’oblige à ne pas se focaliser sur l’idée. « À chaque tournoi, qu’il s’agisse d’un Majeur, du PGA Tour ou du Korn Ferry Tour, on pense forcément à une hypothétique victoire, on imagine ce que ça changerait ; parce qu’à la fin, c’est là que l’on aimerait tous être. »

Les anges en Californie

Pour son 3e U.S. Open en carrière, Paul Barjon débarque donc comme deux ans plus tôt, grâce à une réussite en qualification populairement surnommée « le jour de golf le plus long » pour ses 36 trous organisés sur une même journée. « Avec mon caddie, on est arrivé aux alentours de 6 h 15 sur le golf pour repartir vers 20 h. Et encore, les mecs qui jouaient pour être premier de réserve devaient disputer un play-off, donc eux n’étaient pas au bout de leur peine », raconte-t-il.

De son passage éclair sur le tracé du Durham, le voilà désormais propulsé au milieu des Rahm, Cantlay et autres Koepka sur un parcours qui a pour habitude d’être préparé « pour tuer les joueurs », comme il aime à dire. Pourtant la stratégie y est simple : « Ce sont des parcours faciles à comprendre. Il faut faire des bons coups avec des long clubs, taper la balle tout droit et mettre la balle sur le green », englobe-t-il dans un rire. Mais il sait également que sur un Majeur célèbre pour ses roughs drus et ses greens infrangibles, la sanction est lourde. « À Winged Foot (lors de l'U.S. Open 2020, ndlr) quand j’agissais comme sur un tournoi régulier du PGA Tour, c’était brutal. Ici ce sera pareil, mieux vaut ne pas rater du mauvais côté sinon c’est double bogey pratiquement à chaque fois. » Malgré la souffrance qu’infligera le Los Angeles Country Club et son par 3 de 265 m à l’ensemble du champ, le joueur de bientôt 30 ans ne boude pas son plaisir de jouer un tournoi à part. Une première étape sera de passer un cut qui l’a jusqu’à présent refoulé à chaque tentative, avant de s’autoriser, pourquoi pas, à rêver de se voir au plus haut du classement dimanche.

Les tee times des « Frenchies »

16 h 29 : Ryo Ishikawa, Kevin Streelman, Matthieu Pavon

17 h 46 : David Horsey, Brendan Valdes (a), Paul Barjon

17 h 57 : Jordan Gumberg, Kyle Mueller, Bastien Amat (a)

21 h 37 : Taylor Pendrith, Aldrich Potgieter (a), Romain Langasque

21 h 48 : Andrew Putnam, Victor Perez, Abraham Ancer

N. B. : Horaires donnés en heure française