Absent sur le Tour européen depuis fin 2017, en possession seulement d’une carte sur le Circuit français en début d’année, Julien Quesne, présent aux Jeux de Rio en 2016, effectue un incroyable come-back. Le Manceau pointe à la 32e place de la Road to Mallorca et son objectif est désormais de revenir sur le DP World Tour en fin de saison !

C’est à Edimbourg, dans l’attente de grimper dans son avion en direction de Dublin, que Julien Quesne a pris le temps ce lundi de répondre par téléphone à nos questions. Détendu, animé par un moral d’acier, le Manceau, installé depuis plusieurs années maintenant en Gironde, est en train de réaliser l’un des plus grands come-backs de l’histoire du golf tricolore.
Sans le moindre droit de jeu en début de saison à la fois sur le DP World Tour et sur l’HotelPlanner Tour, en possession seulement d’une carte sur le Circuit français via les Q-School validées au mois de mars à Gujan-Mestras (33) lui permettant ici de prendre part aux deux tournois tricolores au calendrier de la deuxième division européenne (Blot Play9 et Vaudreuil Challenge), Julien Quesne en a profité pour accrocher deux bons résultats : 23e en Bretagne, 12e en Normandie.
Des excellentes sorties, dans la lignée de ses succès fin mars et début avril sur ce même Circuit français à Valescure puis à Mont-de-Marsan, qui lui ont ouvert d’autres portes, comme en Allemagne le 20 juillet (6e au German Challenge avec son fils âgé de 12 ans comme caddie) et en Ecosse le week-end passé (2e au Farmfoods Scottish Challenge).
Entre le jeudi 31 juillet et le dimanche 3 août, le double vainqueur sur le Tour européen en 2012 et 2013 a en effet brillé de mille feux, signant quatre tours hyper solides et en ne concédant qu’un seul bogey en 72 trous.
« Je joue bien depuis le début de l’année, souligne-t-il, d’emblée. A force d’enchainer les tournois, je peaufine le jeu, le matériel, la préparation. Physiquement, ça va mieux depuis un an et demi, deux ans. Je n’avais pas beaucoup d’opportunités de jeu et à chaque fois que je jouais, il fallait que ça se passe bien. J’ai un peu plus de temps pour moi désormais. J’ai travaillé un petit peu plus le petit jeu… »
En finissant à un coup derrière l’Ecossais Daniel Young, Julien Quesne a surtout effectué un bond de géant à la Road to Mallorca : 55 places. Désormais 32e, il est assuré de jouer tous les tournois jusqu’à la fin de la saison sur l’HotelPlanner Tour.
« Je suis aussi assuré d’avoir un droit de jeu plein l’année prochaine, ajoute-t-il, doucement. Tout ça, c’est acquis. Maintenant, à moi d’aller chercher les premières places de la Road… Depuis 2017, depuis que j’ai quitté le Tour européen, je n’ai qu’une seule idée en tête, c’est de revenir au plus haut niveau. Je n’ai jamais lâché le morceau, même sur mon lit d’hôpital. Et ce n’est pas maintenant que je vais lâcher. J’ai les crocs bien profonds dans le truc et je vais continuer de serrer. »
Julien Quesne n’a pas été épargné par le destin. Ses soucis récurrents au dos mais aussi au poignet ont été les causes principales de la perte de sa carte à la fin de la saison 2017 sur le DP World Tour. Depuis, il n’a cessé de s’accrocher, tant bien que mal, croyant en son étoile, malgré les vicissitudes de la vie. A l’image de cette opération (arthrodèse) de la « dernière chance » le 4 janvier 2023, une soudure du sacrum avec la première vertèbre (L5, S1), un mal dont a souffert Tiger Woods.
« J’ai une revanche à prendre sur mon corps, sur mes blessures, rappelle-t-il. Je n’ai que ça en tête. Le dos va beaucoup mieux, j’ai zéro douleur… Après, j’ai les douleurs d’un homme de mon âge avec un dos un peu raide quand il fait froid. Il faut que je m’échauffe un peu plus longtemps que lorsque j’avais 30 ans. Des douleurs aux épaules, aux genoux… Rien de plus normal finalement. Je fais avec. »
A 44 ans, quand certains commencent à imaginer une prochaine reconversion, Julien Quesne, lui, n’a qu’une idée en tête. Poursuivre au plus haut niveau. C’est devenu sa quête. Et tant pis s’il côtoie chaque semaine des joueurs qui ont la moitié de son âge, qui propulsent la balle loin, très loin sur les fairways. Lui a d’autres atouts.
« J’ai l’impression d’arriver à maturité, confirme-t-il. Le petit jeu, j’ai un éventail plus large que celui que je possédais à l’époque quand j’étais sur le Tour. Le swing, je me connais mieux qu’avant. J’arrive aussi à placer le curseur de plus en plus haut dans mon jeu. J’arrive à varier de plus en plus les trajectoires, j’arrive à varier les contacts… Le fait d’avoir passé des années de galère avec les blessures, les opérations, cinq mois sans jouer, etc. J’apprécie d’autant plus. J’ai plus de recul aussi. Et l’attitude est encore meilleure qu’avant. »
« Pour moi, c’est une force de côtoyer ces jeunes joueurs sur l’HotelPlanner Tour, enchaîne-t-il. J’ai beaucoup plus de vécu qu’eux. Je suis plus malin, j’ai une meilleure attitude. Alors c’est vrai que je prends des mètres au départ. 80 % des joueurs me mettent entre dix et quinze mètres. Mais franchement, tu n’as pas besoin de taper à 300 mètres pour faire des scores. Il faut juste être intelligent dans le jeu, avoir un bon petit jeu. Moi, je joue avec mes forces. En Ecosse, c’était un parcours de frappeur, c’était assez large. Les mecs s’en sont donnés à cœur joie et pourtant je finis deuxième sans avoir putté comme il fallait. Si c’est le cas, je gagne le tournoi haut la main. »
La Belgique, c’est fini !
Ce retour au premier plan l’a obligé à stopper sa collaboration avec le golf d’Hulencourt en Belgique où il distillait depuis cinq ans son savoir-faire auprès de la clientèle locale, tous âges confondus. Tout juste essaie-t-il de garder le contact avec certains de « ses joueurs » qu’il continue de suivre du côté du Cabot Bordeaux. C’est le cas par exemple de Victor Veyret. Ils se sont vus lors de la Biarritz Cup à la fin juillet.
« Je l’ai fait bosser une journée en amont du tournoi, précise-t-il. On a fait une reco ensemble. Je dois le revoir dans le courant du mois d’août. J’essaie de combiner les deux mais ce n’est pas simple. »
L’Open de France en septembre ?
Au départ de l’Irish Challenge ce jeudi au Killeen Castle, hôte de la Solheim Cup 2011 remportée par les Européennes, Julien Quesne a d’ores et déjà prévu de ne pas aller en Finlande la semaine prochaine. Il a aussi dans le viseur le prochain FedEx Open de France délocalisé cette année à St-Nom-la-Bretèche (78).
« Physiquement, ça ne me fait pas peur cet enchainement de tournois, prévient-il. On part là-dessus et si les résultats sont bons, j’en louperai un autre. On fera au coup par coup. L’Open de France à St Nom ? C’est toujours un objectif. J’espère bien performer avant cela pour ne pas avoir à me poser la question le moment venu car il y a un tournoi en face aux mêmes dates (l’Italian Challenge, du 18 au 21 septembre). Tous les mecs qui sont en position sur le Challenge Tour n’ont aucun intérêt d’aller jouer l’Open de France, sauf s’ils sont dans les dix premiers de la Road et qu’ils ont de la marge. En fin de saison, les points vont coûter cher. Si tu passes à côté de la carte pour 10 ou 20 points et que tu es allé jouer l’Open de France… Bref, on verra ! Je vais faire les choses intelligemment. »
En attendant, il continue de « travailler » techniquement avec Mathieu Van Hauwe « que j’ai régulièrement au téléphone. » Il a vu deux fois en début d’année Benoit Ducoulombier et une fois Patrick Talon. « Je n’ai personne d’autre, avoue-t-il. Plus de préparateur mental, plus de préparateur physique… Je n’avais pas les moyens de payer tous ces gens. Aujourd’hui, je fais appel à la bricole… Et puis au niveau mental, je suis blindé. »
« Je suis surtout très bien entouré, j’ai beaucoup de chance, conclut-il. Je pense ici à ma femme qui gère la maison, les enfants, son travail et tout le reste quand je ne suis pas là. Elle me laisse poursuivre mes rêves. J’ai quelques sponsors aussi qui me soutiennent depuis plusieurs années, depuis que je suis dans le dur. Ils m’ont tous permis de continuer à jouer plus sereinement : Gerald Bouhourd (C&S Partners), Lacoste, le magasin le golf club 33 à Bordeaux, qui m’aide pour les clubs, Xavier Richomme, Terre Agri, Pascal Groll (Burger King)… Ils méritent tous d’être cités ! »